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Envenimation : scorpion

Spécialité : pediatrie / toxicologie /

Points importants

  • Pathologie accidentelle fréquente dans les zones tropicales et sub-tropicales
  • L’envenimation scorpionique est responsable de manifestations cliniques le plus souvent bénignes (90%)
  • Des signes systémiques sont présents dans près de 3% des cas
  • Des défaillances vitales notamment un OAP ou un état de choc cardiogénique peuvent être présents

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

Généraux

  • Hypersudation
  • Nausées, vomissements
  • Tachycardie (sensation de palpitations)
  • Larmoiement

Spécifiques

  • Fourmillement ± douleur au point de piqûre
  • Réaction cutanée d’intensité variable selon l’espèce du scorpion :
    • réaction cutanée minime : centruroides
    • réaction cutanée inflammatoire modérée : centruroides exilicauda
    • réaction cutanée importante, jusqu’à nécrose cutanée : centruroides exilicauda

CONTEXTE

Terrain

  • Surtout les sujets jeunes et les enfants

Facteurs de risque

  • Milieu rural
  • Certaines espèces sont plus dangereuses que d’autres :
    • androctonus australis en Afrique du Nord
    • leirus quinquestriatus au Moyen orient
    • buthus tamulus en Inde
  • Les âges extrêmes

Circonstances de survenue

  • Pendant les mois d’été
  • Souvent la nuit pendant le sommeil
  • Dans des endroits cachés (sous les pierres, le cactus…)

EXAMEN CLINIQUE

Cardio-vasculaire

  • Tachycardie
  • Troubles du rythme
  • Hyper ou HoTA (jusqu’à état de choc)

Respiratoire

  • Bradypnée jusqu’à arrêt respiratoire
  • Œdème pulmonaire

Neurologiques

  • Révulsions oculaires
  • Flou visuel
  • Convulsions
  • Atteinte des nerfs crâniens, perte du contrôle des muscles pharyngés
  • Difficulté de déglutition
  • <a “pathologies_308″=””>
    Infarctus cérébral
    , thrombose des vaisseaux cérébraux ou même 
    <a “pathologies_189″=””>
    HTIC 
    aiguë secondaire aux piqûres d’une variété de Buthidae

Signes de dysautonomie

  • Stimulation du système parasympathique :
    • HoTA
    • bradycardie
    • salivation
    • larmoiement
    • hypersudation
    • incontinence urinaire ou fécale
    • nausées et vomissements
  • Stimulation du système sympathique :
    • tachycardie
    • HTA
    • hyperthermie
    • priapisme
    • oedème pulmonaire

Selon le stade de gravité on distingue

  • Grade I : C’est l’envenimation bénigne
    • signes locaux (jusqu’à 80 %) au point de ponction
    • pas de signes systémiques
  • Grade II : Envenimation modérée
    • présence de signes systémiques (jusqu’à 10 % des envenimations scorpioniques)
    • les signes les plus fréquents sont l’HTA, les sueurs, l’hyperthermie, et les signes digestifs
    • pas de détresse vitale
  • Grade III : C’est l’envenimation scorpionique grave (présence de détresse vitale. Rare < 5 % des cas) : le tableau comprend de façon plus ou moins associée :
    • un OAP
    • un état de choc cardiogénique
    • un coma
    • des convulsions
       

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

Glycémie capillaire : souvent élevée

SpO2

ECG

  • Rarement normal dans les cas graves
  • Toutes les anomalies pratiquement peuvent être observées
  • Les plus fréquentes sont :
    • tachycardie sinusale
    • troubles de la repolarisation
    • troubles de la conduction
    • ESV
    • TV
    • QT long

CIMU

  • Grade I (signes locaux): tri 4
  • Grade II (signes systémiques sans défaillance vitale) : tri 3
  • Grade III (défaillance vitale) : tri 2 ou 1

Signes paracliniques

  • Non systématique : demandés à partir du grade clinique II
  • Demandés à la recherche de retentissements viscéraux

BIOLOGIQUE

Ionogramme sanguin, pouvant montrer

  • Une hyperglycémie transitoire (fréquente)
  • Hyperprotidémie
  • Hypokaliémie
  • Insuffisance rénale (urée et créatininémie élevées)
  • Rhabdomyolyse (dans les cas graves)

Hyperamylasémie + hyperlipasémie

NFS : hyperleucocytose presque constante

Bilan d’hémostase : troubles de l’hémostase à type de CIVD (rares)

Troponines et BNP élevées (dans certains cas de souffrance myocardique)

Gaz du sang

  • Hypoxémie avec une acidose métabolique
  • Fréquentes dans les tableaux graves compliqués d’un OAP ou d’un état de choc

IMAGERIE

Radiographie thoracique

  • Systématique à partir du grade II de gravité clinique
  • Peut montrer l’OAP

Echographie cardiaque

  • Peut montrer dans les cas graves une diminution importante de la fraction d’éjection avec une dilatation biventriculaire
  • Ces anomalies sont réversibles en cas d’évolution favorable au bout de quelques jours

Scintigraphie myocardique

  • Peut montrer dans ces cas un défect systématisé de fixation qui, avec les troubles de la repolarisation et l’augmentation des enzymes cardiaques, évoquent une origine ischémique

Diagnostic étiologique

  • Les espèces de scorpion dont la piqûre entraîne un tableau grave sont peu nombreuses par rapport aux milliers d’espèces qui existent
  • Parmi les espèces les plus redoutables on peut citer :
    • androctonus australis (Afrique du Nord)
    • leiurus quinquestriatus (Moyen Orient)
    • centruroides noxius et Centruroides infamatus (Amérique Latine)
    • buthus tamulus (Inde)

Diagnostic différentiel

  • Il ne se pose généralement pas quand il y a une évidence d’une notion de piqûre par un scorpion, en zone d’endémie surtout en période estivale
  • Si le scorpion n’a pas été vu, le tableau peut parfois être confondu avec une piqûre d’autres insectes (araignée), de serpents ou de vipères…

Traitement

TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER

En préhospitalier

  • Soins locaux au point de piqûre
  • Mise en condition du patient à partir du garde II de gravité : voie veineuse
  • Initier le traitement adapté au stade de gravité clinique :
  • Transport rapide du patient à l’unité de soins appropriée à son stade de gravité :
    • grade I => salle d’accueil des urgences
    • grades II et III => SAUV voire directement en service de réanimation (risque d’aggravation rapide)

En milieu hospitalier

  • Grade I :
    • antalgiques pour la douleur (paracétamol, ou autres antalgiques palier 1)
  • Grade II :
    • fièvre : antipyrétiques
    • douleur : antalgiques palier 1
    • vomissements : métoclopramide 0,5 mg/kg/24heures chez l’enfant et une ampoule renouvelable en IM ou IV chez l’adulte
    • douleur abdominale : de préférence utiliser les antispasmodiques non atropiniques (type phloroglucinol 1 à 2 amp en IVD ou IM, 3 fois par 24 heures)
    • pic hypertensif :
      • respecter au maximum ce pic hypertensif (peut être juste une manifestation initiale, avec évolution secondaire vers le choc cardiogénique)
      • indications éventuelles de traitement du pic hypertensif = accès hypertensif survenant sur HTA préalable ou accès hypertensif associé à un OAP
  • Grade III :
    • ne pas oublier le traitement des signes des grades I et II en plus du traitement des détresses vitales
    • détresse respiratoire :
      • oxygénothérapie par masque à haute concentration, objectif = SpO2 > 90%
      • si pas d’amélioration => CPAP (mais peu de données pour la CPAP dans ce contexte spécifique)
      • ne pas retarder l’intubation et la ventilation mécanique si persistance de l’hypoxie
    • détresse hémodynamique :
      • dobutamine en commençant par 5 µg/kg/min ; augmenter de 5 µg tous les ¼ d’h si la PA reste basse
      • dose moyenne décrite = 17 µg/kg/min
  • Sérum antiscorpionique pour les grades II et III (efficacité controversée, mais recommandé par les experts)

Suivi du traitement

  • Grade II : prévenir et traiter la déshydratation en cas de diarrhées, vomissements et de transpiration abondante.

MEDICAMENTS

  • Antalgiques (palier I)
  • Antihypertenseurs :
    • pas de molécule recommandée pour le pic hypertensif
    • préférer les molécules injectables par voie IV avec action titrable et de brève durée d’action
  • Les antipyrétiques
  • Les drogues inotropes (dobutamine)
  • L’oxygène, la CPAP
  • Sérum antiscorpionique : dose recommandée = 10 à 20 mL en IV (enfant < 2 ans : 1 mL/kg)

Surveillance

CLINIQUE

  • FR, FC, PA, conscience, SpO2/h
  • Pour les grades I et II, la surveillance doit se faire au Service des Urgences pendant au moins 4 heures ; elle doit rechercher des signes d’aggravation en particulier la survenue d’un OAP
  • Grade II : la surveillance est maintenue surtout de la PA (risque de pic hypertensif ou d’hypotension)

PARACLINIQUE

  • Aucun examen complémentaire n’est nécessaire pour surveiller les patients de grade I et II pendant la période d’observation
  • En cas d’aggravation ou de signes immédiats de gravité (grade III), les examens complémentaires seront fonction de la nature du tableau (OAP, état de choc, coma)

Devenir / orientation

CRITERES D’ADMISSION

  • Grade III : hospitalisation dans un service de soins intensifs
  • L’hospitalisation sera décidée sur la base du score d’hospitalisation suivant : Score d’hospitalisation dans l’envenimation scorpionique

CRITERES DE SORTIE

  • Grade I : le risque de complication est rare voire exceptionnel, le patient peut rentrer à domicile après 4 heures de surveillance
  • Grade II : si aucun signe de complication n’est observé, le patient peut rentrer chez lui après 24 heures d’observation (le risque d’aggravation au-delà de cet intervalle est exceptionnel)

Mécanisme / description

  • L’effet du venin de scorpion est largement déterminé par la libération excessive de catécholamines endogènes
  • Ceci est responsable d’une ischémie myocardique par déséquilibre entre les apports et la consommation d’oxygène au niveau du myocarde (hypothèse la plus retenue)
  • Une myocardite scorpionique par toxicité directe du venin du scorpion ou par l’intermédiaire du médiateur (cytokines ou autres) est également possible

Bibliographie

  • Nouira S, Boukef R, Nciri N, Haguiba H, Elatrous S, Besbes L, Letaief M, Abroug F: A clinical score predicting the need for hospitalization in scorpion envenomation. Am Journal of Emerg Med 2007; 24: 414-419
  • Abroug F, Elatrous S, Nouira S, et al. Serotherapy in scorpion envenomation: a randomised controlled trial. Lancet 1999; 354:906-9
  • Bahloul M, Kallel H, Rekik N, BEN Hamida C, Chelly H, Bouaziz M. Cardiovascular dysfunction following severe scorpion envenomation. Mechanisms and physiopathology. Press Med. 2005; 34 : 115-20
  • Bahloul M, Hamida CB, Chtourou K, et al. Evidence of Myocardial Ischaemia in SevereScorpion Envenomation: Myocardial PerfusionScintigraphy Study. Intensive Care Med 2004;30:461-467
  • R. Soulaymani Bencheikh, A. Khattabi, Z. Faraj, I. Semlali. Conduite a` tenir devant une piqûre de scorpion au Maroc Management of scorpion sting in Morocco. Annales Franc¸aises d’Anesthésie et de Réanimation 27 (2008) 317-322
  • L. Ouanes-Besbes, F. Dachraoui, N. Nciri, I. Ouanes, M. Fkih Hassen, S. Marghli, S. ElAtrous, F. Abroug. Envenimation scorpionique grave : vers un traitement à la carte de la défaillance circulatoire. Réanimation (2008) 17, 676-680
  • Palmira Cupo, Alexandre B. Figueiredo, Antonio P. Filho Antonio O. Pintya, Gerson A. Tavares Júnior, Fábio Caligaris, José A. Marin-Neto, Sylvia E. Hering, Marcus V. Simões. Acute left ventricular dysfunction of severe scorpion envenomation is related to myocardial perfusion disturbance. International Journal of Cardiology 116 (2007) 98-106
  • Semir Nouiraa,T, Souheil Elatrousa, Lamia Besbesa, Riadh Boukef a, Christiane Devauxb, Nicolas Aubreyb, Mohamed Elayebc, Fekri Abrouga. Neurohormonal activation in severe scorpion envenomation: Correlation with hemodynamics and circulating toxin. Toxicology and Applied Pharmacology 208 (2005) 111 – 116
     

Auteur(s) : Semir NOUIRA

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