Spécialité : neurologie /
Points importants
- Incidence (France) : 100 000 cas/an
- Prévalence (France) : 400 000
- 80% des accidents vasculaires cérébraux
- Nécessite un bilan hospitalier en urgence
Présentation clinique / CIMU
SIGNES FONCTIONNELS
Généraux
- Obligatoires :
- déficit neurologique d’installation brutale
- Facultatifs :
- céphalées (signe de dissection)
- nausées (signe d’effet de masse, d’HTIC)
Spécifiques
- Examen neurologique complet à la recherche des signes suivants :
- signes fréquents :
- hémiparésie
- hémihypoesthésie
- hémianopsie homonyme
- troubles de l’élocution : aphasie, dysarthrie
- héminégligence
- ROT plus vifs du côté des signes susnommés
- RCP avec signe de Babinski du côté des signes susnommés
- signes plus rares (dirigeant vers un infarctus cérébral vertébrobasillaire) :
- diplopie
- hémiataxie
- nystagmus
- syndrome alterne
- troubles de la conscience
- score NIHSS
- signes fréquents :
CONTEXTE
Terrain
- Sujet > 50 ans avec facteurs de risques vasculaires
Antécédents
- Coronaropathie, ACFA
- AIT, AVC
- Artériopathie périphérique
- Valvulopathie cardiaque
Facteurs de risque
- Age, tabagisme actif
- HTA, diabète, dyslipidémie
- Ethylisme, fibrillation auriculaire
EXAMEN CLINIQUE
Déficit neurologique d’installation brutale
Syndrome d’infarctus territorial (« grande artère »)
- Déficit d’un hémicorps associé à des signes corticaux :
- aphasie
- négligence
- hémianopsie homonyme
Syndrome d’infarctus lacunaire (« petite artère »)
- Déficit d’un hémicorps sans signes corticaux. Constellations classiques :
- déficit moteur pur d’un hémicorps
- déficit sensitif pur d’un hémicorps
- déficit sensitivomoteur pur d’un hémicorps
- hémiparésie ataxique
- dysarthrie – main malhabile
- hémiballisme aigu
EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES
- Pression artérielle
- Température
- Fréquence cardiaque (ACFA ?)
- ECG (ACFA ?)
- Glycémie capillaire
CIMU
- Tri 1 à 3 selon gravité
Signes paracliniques
BIOLOGIQUES
- En urgence : numération, TP, TCA, glycémie capillaire, CRP
- Bilan étiologique : recherche de facteurs de risque vasculaire (bilan lipidique à jeun, glycémie à jeun, HbA1c)
IMAGERIE
Indispensable
- Scanner cérébral sans injection en urgence
Souhaitable
- IRM cérébral (idéalement avec séquences : DWI, FLAIR, T1, T2, T2*, ARM)
- Angio-scanner
- Echodoppler des troncs supra-aortiques
- Doppler transcrânien
Cas particulier
- Artériographie cérébrale
Diagnostic étiologique
Infarctus territorial (« grande artère »)
- Cause embolique :
- d’origine cardiaque (fibrillation auriculaire, valvulopathie, thrombus cardiaque, …) :
- faire ECG, Holter-ECG, ETT, ETO
- d’origine artérielle (sténose d’une artère cervicale) :
- faire échodoppler des troncs supra-aortiques, angioscanner, ARM cervicale selon contexte
- d’origine cardiaque (fibrillation auriculaire, valvulopathie, thrombus cardiaque, …) :
- Cause athérothrombotique (artériosclérose intracrânienne) :
- faire Doppler transcrânien, angioscanner, ARM selon contexte
Infarctus lacunaire (« petite artère »)
- Artériolosclérose des artères perforantes cérébrales :
- favorisée par : HTA, diabète
- IRM cérébrale
- MAPA, glycémie à jeun, HbA1c
- Artériosclérose intracrânienne :
- doppler transcrânien, angioscanner, ARM, artériographie selon contexte
Infarctus hémodynamique (« jonctionnel »)
- Sténose artérielle serrée extra- ou intracrânienne :
- échodoppler des troncs supra-aortiques, doppler transcrânien, angioscanner, ARM, artériographie selon contexte
- échodoppler des troncs supra-aortiques, doppler transcrânien, angioscanner, ARM, artériographie selon contexte
Diagnostic différentiel
- Hémorragie cérébrale (éliminée par imagerie cérébrale)
- Hémorragie sous-arachnoïdienne (éliminée par imagerie cérébrale, PL)
- Accident ischémique transitoire (éliminé, si symptômes persistent > 1 heure)
- Crise d’épilepsie (déficit postcritique, parésie de TODD)
- Migraine avec aura (si ATCD similaires ou migraine hémiplégique familiale connus)
- Sclérose en plaques (poussée provoquant un nouveau déficit neurologique)
- Hypoglycémie
Traitement
TRAITEMENT INTRAHOSPITALIER
Stabilisation initiale
- Traitement antithrombotique :
- traitement antiplaquettaire par aspirine est recommandé dès que possible après un AVC ischémique artériel, sauf si un traitement fibrinolytique est envisagé (baisse de mortalité de 6 cas sur 1000 infarctus cérébraux)
- Traitement par thrombolyse systémique (rtPA) :
- le rtPA (ALTEPLASE) par voie IV est recommandé en cas d’AVC ischémique de moins de 3 heures, dont l’heure de début peut être précisée avec certitude, en l’absence de contre-indications (indication selon AMM)
- scientifiquement, son efficacité a été prouvée jusqu’à 4 ½ heures après la survenue des symptômes initiaux (AMM en attente)
- il est recommandé de ne pas utiliser le rtPA en dehors d’une structure spécialisée dans la prise en charge des AVC
- Critères d’éligibilité :
- diagnostic d’AVC ischémique entraînant un déficit neurologique évaluable
- les signes neurologiques ne doivent pas disparaître spontanément
- les signes neurologiques ne doivent pas être mineurs et isolés
- le traitement des patients ayant un déficit neurologique majeur doit être prudent
- les symptômes ne doivent pas suggérer une hémorragie sous-arachnoïdienne
- apparition des symptômes moins de 3 heures avant le début du traitement
- absence de traumatisme cérébral ou d’AVC dans les 3 derniers mois
- absence d’IDM dans les 3 derniers mois
- absence d’hémorragie gastro-intestinale ou urinaire dans les 21 derniers jours
- absence d’acte chirurgical majeur dans les 14 derniers jours
- absence de ponction artérielle dans un site non compressible dans les 7 derniers jours
- absence d’ATCD d’hémorragie intracrânienne
- PA non élevée (systolique < 185 mmHg et diastolique < 110 mmHg)
- absence de saignement actif ou de traumatisme aigu (fracture) à l’examen
- pas de traitement anticoagulant oral ; si traitement anticoagulant oral : INR < 1,5
- en cas d’administration d’héparine dans les 48 dernières heures, tests de coagulation normaux
- plaquettes > 100 000 /mm3
- glycémie > 2,7 mmol/L (0,5 g/L)
- pas de crise convulsive avec déficit neurologique résiduel
- le scanner cérébral ne montre pas d’infarctus multilobaire (pas d’hypodensité > 1/3 hémisphère cérébral)
- le patient ou son entourage comprennent les risques et bénéfices possibles du traitement
- Critères d’exclusion (comme tous les agents thrombolytiques, l’altéplase ne doit pas être utilisé dans tous les cas associés à un risque hémorragique élevé) :
- diathèse hémorragique connue
- traitement concomitant par des anticoagulants oraux
- hémorragie sévère ou potentiellement dangereuse, manifeste ou récente
- ATCD ou suspicion d’hémorragie intracrânienne
- suspicion d’hémorragie sous-arachnoïdienne ou ATCD d’hémorragie sous-arachnoïdienne liée à un anévrysme
- ATCD de lésion sévère du système nerveux central (par exemple néoplasie, anévrysme, intervention chirurgicale intracérébrale ou intrarachidienne)
- rétinopathie hémorragique, diabétique par exemple
- massage cardiaque externe traumatique récent (moins de 10 jours), accouchement
- ponction récente d’un vaisseau non accessible à la compression
- HTA sévère non contrôlée
- endocardite bactérienne, péricardite
- pancréatite aiguë
- ulcères gastro-duodénaux documentés au cours des 3 derniers mois, varices oesophagiennes, anévrysme artériel, malformations artérielles ou veineuses
- néoplasie majorant le risque hémorragique
- hépatopathie sévère y compris insuffisance hépatique, cirrhose, hypertension portale, varices oesophagiennes et hépatite évolutive
- intervention chirurgicale ou traumatismes importants au cours des 3 derniers mois
- Dans l’indication d’AVC ischémique à la phase aiguë, les contre-indications complémentaires sont :
- symptômes d’AVC ischémique apparus plus de 3 heures avant l’initiation du traitement ou dont l’heure d’apparition est inconnue
- déficit neurologique mineur ou symptômes s’améliorant rapidement avant l’initiation du traitement
- AVC jugé sévère cliniquement (par exemple NHSS > 25) et/ou par imagerie
- crises convulsives au début de l’AVC
- signes d’hémorragie intracrânienne au scanner
- symptômes suggérant une hémorragie sous-arachnoïdienne, même en l’absence d’anomalie au scanner
- administration d’héparine au cours des 48 heures précédentes avec un temps de thromboplastine dépassant la limite supérieure de la normale
- patient diabétique présentant des antécédents d’AVC
- antécédent d’accident vasculaire cérébral au cours des 3 derniers mois
- plaquettes inférieures à 100 000/mm3
- PAS > 185 mmHg ou PAD > 110 mmHg, ou traitement d’attaque (voie IV) nécessaire pour réduire la PA à ces valeurs seuils
- glycémie < 50 ou > à 400 mg/dL
- utilisation chez l’enfant et le sujet âgé : Actilyse n’est pas indiqué pour le traitement de l’AVC à la phase aiguë chez les patients < 18 ans ou > 80 ans
- l’expérience de l’administration d’Actilyse pendant la grossesse ou l’allaitement est très limitée. En cas de menace du pronostic vital, il faut prendre en considération les bénéfices attendus et les risques éventuels
- Traitement de l’HTA :
- il est recommandé de respecter l’HTA à la phase aiguë d’un AVC ischémique sauf dans les cas suivants :
- si un traitement fibrinolytique est indiqué : la PA doit être < 185/110 mmHg si un traitement fibrinolytique n’est pas indiqué
- en cas de persistance d’une HTA > 220/120 mmHg
- en cas de complication menaçante de l’HTA
- il est recommandé de respecter l’HTA à la phase aiguë d’un AVC ischémique sauf dans les cas suivants :
- Hyperthermie > 37,5°C :
- corrélation linéaire entre hyperthermie et morbi-mortalité post-AVC (augmentation de 10% par 1°C)
- Intervention neurochirurgicale :
- pour infarctus malin (infarctus complet de l’artère cérébrale moyenne) : bénéfice d’une hémicrâniectomie prouvé pour patients < 55 ans, si réalisée en < 48h après début des symptômes
- Infarctus cérébelleux avec compression du 4e ventricule ou du tronc cérébral
- Intervention neuroradiologique :
- thrombolyse intra-artérielle (hors AMM) avec bénéfice démontré pour occlusion proximale de l’artère cérébrale moyenne, traitée en < 6heures après début des symptômes
- Thrombectomie mécanique (hors AMM) au cas par cas durant les premières heures après début des symptômes
MEDICAMENTS
Traitement antithrombotique
- Traitement antiplaquettaire par aspirine (160 à 300 mg/j), sauf si un traitement fibrinolytique est envisagé
Traitement par thrombolyse IV
- rtPA (Actilyse) 0,9mg/kg :
- 10% en bolus IV
- 90% en IVSE sur 60 min
HTA
- Si indication, traitement par voie veineuse :
- urapidil
- labétalol
- nicardipine
- Eviter les doses de charge
- Abaissement progressif et maintien < 220/120 mmHg
- Surveillance de l’état neurologique afin de dépister l’aggravation du déficit
- L’objectif tensionnel est à adapter au cas par cas
- Maintenir le traitement antihypertenseur préexistant
Hyperthermie > 37,5°C
- Antipyrétique (type paracétamol)
Traitement préventif des complications thromboemboliques
- HBPM à faibles doses est recommandé dès les 24 premières heures
- Si contre-indication (risque hémorragique intra et extracrânien) : contention élastique
Surveillance
CLINIQUE
- Vigilance
- Déficit neurologique :
- fluctuation
- aggravation
- Respiration, voies aériennes
- Déglutition
PARACLINIQUE
- Température / hyperthermie
- PA, FC
- SpO2
- Etat cutané
Devenir / orientation
CRITERES D’ADMISSION
Unité de soins intensifs neurovasculaire
Réanimation, si
- Traitement des comorbidités sévères curables, telles que pneumopathie de déglutition, embolie pulmonaire, insuffisance cardiaque, etc. chez les patients ayant un bon pronostic neurologique
- Geste neurochirurgical (par exemple pour HTIC) ou neuroradiologique interventionnel (embolisation, désobstruction mécanique, etc.) envisagé
- Situations neurologiques instables et réversibles, telles que troubles de conscience, état de mal épileptique, éclampsie
Selon profil du patient et gravité/stabilité de l’infarctus cérébral
- Service de Neurologie
- Service de Médecine Interne
- Service de Gériatrie aiguë
- Service de Rééducation
SUIVI DU PATIENT
Assurer le traitement d’aigu et le bilan étiologique
- Hospitalisation dans une unité spécialisée
Assurer prévention
- Traitement antiplaquettaire ou anticoagulant
- Traitement / contrôle des facteurs de risque vasculaire
Assurer rééducation (en hospitalisation, hospitalisation de jour, ambulatoire)
- Kinésithérapie
- Orthophonie
- Ergothérapie
Assurer contexte médico-social
- Arrêt de travail
- Demande de prise en charge à 100% (AVC invalidant)
- Aide à domicile
Assurer prévention et surveillance de possibles complications secondaires
- Complications neurologiques :
- spasticité
- démence
- dépression
- chutes
- épilepsie
- Complications de l’hypomobilité :
- thromboembolisme
- complications orthopédiques (pied varus équin, rétractions tendineuses, déformations squelettiques,)
- complications cutanées : escarres
- constipation
- dénutrition ou déshydratation
- douleur
- complications infectieuses
Mécanisme / description
Infarctus territorial (« grande artère »)
- Cause embolique :
- d’origine cardiaque (fibrillation auriculaire, valvulopathie, thrombus cardiaque, …)
- d’origine artérielle (sténose d’une artère cervicale)
- cause athérothrombotique (artériosclérose intracrânienne)
Infarctus lacunaire (« petite artère »)
- Artériolosclérose des artères perforantes cérébrales :
- favorisée par : HTA, diabète
- Artériosclérose intracrânienne
Infarctus hémodynamique (« jonctionnel »)
- Sténose artérielle serrée extra- ou intracrânienne
Auteur(s) : Christian STAPF
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