Spécialité : toxicologie /
Points importants
- Les hallucinogènes, pour la plupart des substances illicites, sont essentiellement d’origine végétale (alcaloïdes), ou des produits synthétiques
- Les substances hallucinogènes les plus connues sont le LSD, la psilocybine, la mescaline (cactus), le STP ; le PCP, la kétamine, le GHB, le MDMA, le datura…
- Leur gravité est liée à une forte adhésion du sujet à ses hallucinations avec risque d’autolyse, de défénestration, d’auto et hétéro-agressivité
- Certains troubles génèrent des états d’anxiété, de dépersonnalisation et de dépression provoquant chez l’usager « un mauvais voyage » qui peut se terminer par un suicide ou un acte de violence
- Ces substances sont à l’origine d’effets récurrents (flash-back) en dehors de toute nouvelle prise de drogue
- Il n’existe pas de dépendance mais une tolérance est possible si usage répété
Présentation clinique / CIMU
SIGNES FONCTIONNELS
Troubles neuropsychiques
- Hallucinations, délires, paranoïa
- Troubles du comportement, du jugement et de la perception neuro-spatiale
- Anxiété, panique, dépression
- Diminution du sommeil et de la sensation de fatigue
- Tremblements, incoordination
- Flash-back, effets d’écho (effets récurrents sans prise de drogue)
- Mauvais voyage « bad trip » (troubles du comportement dangereux avec tendance au suicide ou acte de violence, exemple avec LSD)
- Agitation, agressivité
- Convulsions
- Coma
Signes digestifs
- Nausées
- Vomissements
- Douleurs abdominales (champignons)
- Anorexie
Signes cardiaques
- Douleur thoracique
- Palpitations
- Tachycardie ++
- Bradycardie +
- Arrêt cardiaque, mort subite (kétamine)
Pulmonaire
- Tachypnée
- Toux
- Dyspnée
CONTEXTE
Terrain
- Le plus souvent ce sont des adultes jeunes ou adolescents
- Usage récréatif ou festif dans les soirées, les sectes, groupes culturels
- Toxicomanie : expérience ou polytoxicomanie
Antécédent
- Recherche de toxicomanie antérieure, de pathologie psychiatrique ?
Circonstances de survenue
- Intoxication accidentelle chez les enfants de parents consommateurs
- Intoxication volontaire par poly-toxicomanie
- Intoxication dans les groupes (sectes, raves parties, free parties…)
- Quelle voie d’administration (inhalation, ingestion) ? :
- inhalation, sniff (salvia divinorum): effets de 5 à 10 min
- ingestion : fréquente, les effets se font sentir en quelques min à 1 h
- injection (PCP, kétamine) : les effets apparaissent en quelques min
Le patient a-t-il pris d’autres toxiques : médicaments ? alcool ? autres drogues ?
EXAMEN CLINIQUE
Effet anticholinergique
- Mydriase
- Confusion
- Agitation
- Tachycardie
Troubles neuro-végétatifs
- Sueurs
- Tachycardie sinusale
- Variation de la température corporelle
- Perte d’appétit
- Sécheresse buccale
Syndrome hyperadrénergique
- Tachycardie
- HTA
- Sueurs
- Mydriase
- Agitation
- Hyperthermie
- Hyperglycémie
Neurologique
- Confusion
- Céphalées
- Vertiges
- Tremblements (LSD)
- Paresthésies
- Mydriase (datura)
- Myosis (LSD)
- Trismus
- Myoclonies (GHB)
- Troubles de l’équilibre et de la coordination
- Coma
- Convulsions
- AVC (amphétamines)
Psychiatrique
- Troubles du langage et de la vue
- Diminution de la concentration, de la perception et de l’attention
- Hallucinations, délires
- Flash-back, effets d’écho
- Dépersonnalisation, illusions, synesthésies
- Anxiété, attaque de panique, paranoïa
- Dépression
- Troubles du comportement
- Psychose (surtout chez le sujet prédisposé)
- Agitation, agressivité
Cardio-vasculaire
- Douleurs thoraciques (éliminer un SCA)
- Palpitations (ESV)
- Troubles du rythme (ECG ++)
- HTA ++
- HoTA +
- Tachycardie ou bradycardie sinusale
Pulmonaire
- Sensation dyspnéisante
- Tachypnée
- Toux
- Bronchite
Digestif
- Nausées, vomissements
- Crampes abdominales
- Hépatite (amphétamines)
Autres
- TC avec ou sans perte de connaissance
- Fracture ou autre traumatisme (chutes)
- Malaise
- Décès par suicide, défenestration, syndrome hyperthermie-rhabdomyolyse
- Hyperthermie (ecstasy)
- Hyperglycémie
- Rhabdomyolyse : crampes musculaires (muscimole), lésions d’appui au sol
- SIADH (ecstasy)
- CIVD (ecstasy)
EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES
ECG
- Tachycardies ou bradycardies sinusales ou tachyarythmies :
- signes de syndrome coronarien aigu
- troubles du rythme (association de drogues, médicaments)
- ESV
- Glycémie capillaire : rechercher une hypoglycémie (anorexie) ou hyperglycémie (syndrome adrénergique)
- EEG : si crise convulsive
CIMU
- Tri 1 à 3 en fonction de la gravité clinique
Signes paracliniques
BIOLOGIQUE
- Ethylomètre ou éthanolémie : la co-consommation d’alcool a un effet synergique (datura, GHB…)
- NFS plaquettes
- Ionogramme (déshydratation, hyperglycémie)
- Créatinine (insuffisance rénale fonctionnelle), CPK (rhabdomyolyse)
- Transaminases (atteinte hépatique)
- Troponine : si douleur thoracique ou anomalies ECG
- Gazométrie artérielle si détresse respiratoire aiguë
- CRP, hémocultures en cas de fièvre (risque infectieux par voie injectable)
- ßHCG (patiente en âge de procréer)
IMAGERIE
- ASP si ingestion
- Radiographie du thorax en cas d’inhalation, si dyspnée, fièvre ou douleur thoracique, recherchant :
- pneumopathie d’inhalation (coma)
- pneumothorax, pneumomédiastin
- Scanner cérébral :
- si troubles de la vigilance, céphalées ou traumatisme crânien
Diagnostic étiologique
- Dépistage urinaire des produits stupéfiants (amphétamines, LSD, THC…) :
- en situation de polytoxicomanie
- pour l’épidémiologie de la polyconsommation
- intérêt médico-légal (passage à l’acte, coma, soumission chimique)
Diagnostic différentiel
Lésions du SNC
- Traumatisme crânien
- AVC
- Hémorragie
- Tumeur
- Epilepsie temporale
Infections
- Méningo-encéphalite virale ou bactérienne
Causes toxiques
- CO
- Alcool
- Opiacés
- Psychotropes
- Antihistaminiques
- Toxicomanie
- IMV polymédicamenteuse
Causes métaboliques
- Hypoglycémie
- Hyperammoniémie
- Hypercalcémie
- Coma hyperosmolaire
Traitement
TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER
Stabilisation initiale
- Placer le patient au calme, avec éclairage doux
- Calmer, rassurer et dédramatiser la situation
- Contention physique si agitation incontrôlable ou hallucinations
- Refroidissement externe si fièvre
- Antipyrétique
- Voie veineuse périphérique si nécessaire
- Hydratation : NaCl 0,9 % (1 à 3 L/24 h) + vitamine B1
- Monitorage ECG
- ß bloquants ++ si hyperexcitabilité myocardique ou HTA
- Diazépam : agitation
- Anti-épileptiques : clonazépam, phénytoïne (Prodilantin)
- Oxygénothérapie
- Intubation orotrachéale et ventilation mécanique avec sédation si coma, détresse respiratoire
- Prévenir le réanimateur en présence de signes de gravité :
- signes cardiovasculaires
- coma
- hyperthermie maligne
- troubles du rythme
- complication respiratoire
Suivi du traitement
- Décontamination digestive si patient vu dans l’heure :
- charbon activé en l’absence de contre-indication
- BZD : diazépam (Valium), 5-10 mg IV lente renouvelable) :
- si HTA, tachycardie
- agitation, anxiété, hyperthermie maligne
- HTA/tachycardie :
- BZD
- propranolol (Avlocardyl)
- Lutte contre l’hyperthermie (en débutant par des moyens simples) :
- refroidissement externe
- réhydratation +++
- antipyrétique : paracétamol 1g en IV perfusion en 20 min
- dantrium (Dantrolène) 1 mg/kg IV à répéter si besoin sans dépasser 10 mg/kg. Il est inefficace si l’hyperthermie est liée au syndrome sérotoninergique
- Rhabdomyolyse :
- réhydratation au NaCl 0,9% perfusion IV
- alcalinisation avec du bicarbonate 1,4% IV
- Douleur thoracique (SCA) :
- aspirine 250 mg
- morphine titrée IV
- dérivés nitrés
- ß bloquants
MEDICAMENTS
- Charbon activé (Carbomix, Toxicarb) : 50 g (maxi) ou 1g/kg chez l’enfant
- Diazépam (Valium) ++ : 5-10 mg IV lente, renouvelable
- Halopéridol (Haldol) : 5 mg IM à renouveler
- Paracétamol (Perfalgan) : 1 g en perfusion IV sur 20 min
- Antispasmodiques (Spasfon) : 1 à 3 ampoules IV lente ou perfusion
- Oxygène : MHC ou lunettes
- Propranolol (Avlocardyl) : 1 mL ou 1mg IV lente, renouvelable
- Clonazépam (Rivotril) : 1 mg IV, à renouveler
- Thiamine (vitamine B1) : 100 mg IV ou IM
- Trinitrine : IVSE, 10 à 100 µg/min
- Eviter : les phénothiazines (peuvent aggraver les confusions)
Surveillance
CLINIQUE
- Conscience, score de Glasgow
- Paramètres vitaux : T°, FR, FC, PA, SpO2, SpCO
- Scope
- ECG
Devenir / orientation
EN PREHOSPITALIER
- Transport aux urgences en ambulance et par le SAMU si éléments de gravité
EN INTRAHOSPITALIER
Critères d’admission en réanimation
- Poly-toxicomanie avec retentissement cardiovasculaire
- Troubles de la conscience, convulsions
- Troubles du rythme
- HoTA
- Détresse respiratoire
- Hyperthermie maligne
Critères de sortie
- Examen clinique et ECG normaux après 8 h d’observation
- Aucune anomalie ionique
- Identification du (des) toxique(s) en cause
- Consultation psychiatrique si geste suicidaire, dépression ou psychose secondaire
- Sortie accompagnée par un adulte
Mécanisme / description
Hallucinogènes délirants
- Ce sont les anticholinergiques : alcaloïdes (datura…)
- Tropanes : origine végétale : atropine, scopolamine, hyoscyamine
- Antihistaminiques : diphenhydramine, dimenhydrinate (Dramamine)
Hallucinogènes dissociatifs
- Antagonistes des récepteurs de NMDA : kétamine, PCP, Ibogaïne
- Agonistes des récepteurs opioïde kappa : salvinorine A (salva divinorum)
- Gaz : protoxyde d’azote
- Cholinergiques, agonistes des récepteurs GABA-A : origine végétale : muscarine, acide iboténique, muscimole
Hallucinogènes psychédéliques
- Tryptamines : yopo, psilocybine (psilocybe : champignon hallucinogène), ibogaïne (iboga), diméthyltryptamine (DMT)…
- Phényléthylamines : mescaline (cactus peyotl), DOM (STP), MDMA, MDA, cathinone (khat), myristicine (noix de muscade), 2CB, 2CI
- Bêta-carbolines : harmine et harmaline (plante ayahuasca)
- Cannabinoïdes : cannabinol, THC
- Esters divers : atropine, scopolamine, hyosciamine (solanacées : datura, belladone, mandragore, jusquiame, stramoine), muscimole (amanite-tue), PCP, kétamine (Kétalar), LSD
- Produits volatiles : nitrite d’amyle (poppers), éther, chloroforme
- Autres : GHB
Pharmacologie
- Pénétration par voie respiratoire ou digestive, effets apparaissent entre 30 min et 3 heures après l’intoxication
- Injectable : kétamine, PCP, effets immédiats ou < 10 min
- Agonistes des récepteurs de sérotonine type 5-HT 2A : les psychédéliques
- Antagonistes des récepteurs de NMDA : kétamine, PCP, ibogaïne
- Agonistes des récepteurs kappa : salvinorine A (Salvia divinorum)
- Agonistes des récepteurs GABA-A : muscimole, acide ibotonique
- Effet anticholinergique : datura, atropine, belladone
- Traverse la barrière placentaire (majorité des hallucinogènes)
Bibliographie
- Wu LT, Schlenger WE, Galvin DM. Concurrent use of methamphetamine, MDMA, LSD, ketamine, GHB, and flunitrazepam among American youths. Drug Alcohol depend 2006
- Pierrot M, Josse P, Raspiller MF et al. Intoxications par champignons hallucinogènes. Annales de médecine interne. 2000, 151 : B16-B19
- Bismuth C. Toxicologie clinique. Médecine-Sciences, Flammarion, 5e édition,2000,Paris
- Arditti J, Bourdon JH, Gilli R et al. Les nouvelles plantes à potentiel d’abus. Annales de Toxicologie Analytique.2004 ;3 :171
- Arditti J, Bourdon JH. Drogues de rue. Urgences SFMU. Edition LC, 2006 : 349-454
Auteur(s) : Mohamed HACHELAF
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