Spécialité : pathologies circonstancielles /
Points importants
- Electrisation = ensemble des manifestations physiopathologiques liées au passage d’un courant électrique à travers ou sur le corps
- Electrocution = décès du patient
- Flash électrique = phénomène lumineux et thermique, dont les températures peuvent atteindre 20 000°C, sans passage de courant au niveau de l’organisme
- Arc électrique = conséquence d’un amorçage à distance entre 2 conducteurs, où le passage de courant est le plus souvent superficiel
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- Lésions liées au courant
- Pathologies rares mais 10 fois plus souvent mortelles que les accidents ordinaires, 3 à 4% du recrutement des services de brûlés en Europe, soit environ 250 cas annuels en France, mortelles dans près de 3% des cas
- Courant basse tension (BT), < 1000 volts (V), comprenant le courant domestique (120 à 240 V) et le courant industriel (340 à 600 V)
- Courant haute tension (HT) > 1 000 V
- Pronostic fonctionnel sévère : courant HT : 35% d’amputation majeure de membre, 73% de séquelles neurologiques, 5,3% des patients sont capables de retrouver leur état de santé antérieur
- Le suivi de ces patients doit être prolongé (au moins 1 an et demi)
- Autres types d’électrisation, moins fréquents :
- électrisations par arc électrique à proximité des caténaires « train surfer ». Une quinzaine d’accidents/an déplorés par la SNCF dont 4 décès depuis 1996
- électrisations mortelles par courant < 80 V
- accidents iatrogènes par matériaux électriques médicaux (défibrillation, électrothérapie en psychiatrie, bistouri électrique, oxymètre de pouls)
- autres mécanismes (armes, TASER…)
- Accident de travail ou accident domestique
- Plus de 95% des décès secondaires à une arythmie létale, le plus souvent une FV
- 5% par asystolie (passage du courant par le coeur, d’origine anoxique, par tétanisation des muscles respiratoires ou par sidération des centres respiratoires médullaires ou traumatique)
- Cas d’angor appelé angina pectoris electrica, pouvant durer quelques mois (symptomatologie tant clinique qu’électrique volontiers atypique, parfois retardée de plusieurs jours)
- Recherche de souffle vasculaire, de diminution ou d’abolition de pouls (vasospasmes, thromboses artériels)
- Atteinte du système nerveux autonome :
- épisodes fréquents d’HTA possiblement en rapport avec un relargage de catécholamines
- Brûlures électriques liées à l’effet thermique du courant :
- suspectées lors de la découverte des points d’entrée et de sortie du courant (marques électriques de Jellineck), pathognomoniques, ayant un intérêt médico-légal pour la reconnaissance d’une électrisation (décès inexpliqué par exemple) :
- point d’entrée : zone de nécrose centrale marbrée ou blanchâtre, légèrement déprimée, cartonnée, insensible, ne saignant pas à la scarification +/- zone de brûlure du 2e degré profond en périphérie
- point de sortie : zone bien limitée de nécrose blanche ou grise, formant une ulcération qui peut être plus étendue lors des électrisations par courant HT
- zones articulaires dont le paquet vasculo-nerveux est plus vulnérable (poignet par exemple) :
- rechercher particulièrement les anomalies de la peau (Œdème, couleur de la peau, aspect marbré)
- troubles de sensibilité
- suspectées lors de la découverte des points d’entrée et de sortie du courant (marques électriques de Jellineck), pathognomoniques, ayant un intérêt médico-légal pour la reconnaissance d’une électrisation (décès inexpliqué par exemple) :
- Brûlures électrothermiques (HT) associées à un syndrome de loge dans 54% des cas, concernant surtout les membres supérieurs, 42% à 79% d’entres-elles conduisent à des amputations majeures
- Brûlures par flash :
- lésions thermiques pures, volontiers étendues, en règle du 2e degré profond et du 3e, avec atteinte ophtalmologique fréquente, souvent aggravée par une ignition des vêtements
- Brûlures par arc : les plus fréquentes (80%)
- Brûlures mixtes (7% des cas) dans la grande majorité des cas, secondaires aux courants HT
- Aspects de tatouage provenant de la fusion des métaux (bijoux, fermeture éclair) : marques noirâtres évoquant des brûlures profondes mais disparaissant, généralement, au décapage, parfois associées à des brûlures profondes de contact
- Brûlure au niveau de la commissure labiale (fréquente chez les enfants lors de morsures de prise électrique)
- Rechercher les complications neurologiques liées à la chute avant de les attribuer au passage du courant (+++)
- Atteintes centrales :
- perte de connaissance pouvant aller jusqu’au coma profond (8% des complications en courant BT, entre 20% et 45% en HT)
- amnésie
- crises d’épilepsie parfois atypiques, évoluant très rarement vers une épilepsie tardive
- Atteintes médullaires :
- secondaires au passage du courant ou post-traumatiques (2/3 de séquelles permanentes)
- hématomes intracrâniens
- thrombophlébites cérébrales
- Atteintes périphériques :
- paralysies, parésies et troubles sensitifs
- le nerf le plus souvent lésé est le médian au poignet, suivi du nerf cubital, radial et péronier
- Atteintes du système nerveux autonome :
- douleurs à type de brûlure, d’hyperpathie, d’allodynie et d’hyperalgésie, survenant dans les heures ou jours suivants, et durant plusieurs semaines
- Syndrome de stress post-traumatique :
- fréquent et touche aussi l’entourage (témoins, parents, collègues de travail)
- une orientation précoce vers une équipe de psychiatre ou neuropsychologue est seule garante d’une limitation des conséquences à long terme
- Lésions oculaires, en particulier secondaires à l’arc :
- de la simple conjonctivite à l’atteinte rétinienne et à la survenue d’une cataracte (30% des cas après électrisation par courant HT), parfois tardive
- Anomalies pupillaires fréquentes (myosis mais aussi mydriase, anisocorie, parfois non réactive) le plus souvent réversible. Dans ces cas là, la taille de la pupille ne peut plus être intégrée dans l’examen neurologique
- Appareil auditif et vestibulaire :
- perforation tympanique (par effet blast)
- atteinte de l’oreille interne
- Asphyxie d’origine ventilatoire par tétanisation des muscles respiratoires
- En dehors de ce mécanisme, toutes les atteintes pulmonaires sont secondaires à des courants HT :
- rares signes d’OAP (cardiogénique, neurogénique, lésionnel dans le cadre de blast)
- signes d’intoxication au CO, d’inhalation de produits de combustion de matériaux
- signes de blast (pneumothorax)
- Iléus, ± prolongé, retrouvé dans près de 25% des cas ; lorsqu’il dure plus de 48 heures, il faut rechercher une lésion intra abdominale
- Ulcères de stress (3 à 7%)
- L’atteinte des organes profonds (1,7%) est le plus souvent associée à une atteinte pariétale mais pas exclusivement
- Secondaires à courant HT :
- perforation de l’estomac, intestinale, vésicale, du caecum
- atteinte du grêle
- cholécystite
- atteinte pancréatique (nécrose) et hépatique sur un trajet rétropéritonéal du courant
- En dehors des lésions électriques, il ne faut pas oublier les conséquences traumatiques intra-abdominales
- Même en l’absence de notion de contracture et/ou de chute, l’électrisé est un traumatisé jusqu’à preuve du contraire.
- Lésions traumatiques secondaires à l’effet de blast (seulement lors des arcs en HT)
- Les luxations ou fractures sont le plus souvent la conséquence de la tétanisation et touchent préférentiellement la tête humérale et l’articulation de l’épaule, le rachis, la tête fémorale
- L’utérus gravide hyperhémique et le liquide amniotique sont d’excellents conducteurs, et la résistance de la peau foetale est 200 fois inférieure à celle du nouveau-né
- Autres complications :
- retard de croissance intra utérin
- oligohydramnios
- décollement placentaire
- Troubles du rythme ventriculaire : FV, TV
- Courant BT :
- le plus fréquemment :
- tachycardie sinusale
- modifications non spécifiques du segment ST et de l’onde T
- ESV
- mais aussi :
- épisodes de TSV, ACFA, des troubles de conduction, des bradycardies
- anomalies habituellement résolutives en quelques heures à quelques jours
- rattachées à l’électrisation si les modifications sont enregistrées sur un ECG précoce et si on observe une évolution des modifications dans le temps
- allongement du QT (15%) se normalisant en 24h
- le plus fréquemment :
- Courant HT :
- ECG anormal dans 5% à 40% des cas
- anomalies du segment ST (associées à un IDM seulement dans 50% des cas)
- Pour le pH urinaire (prise en charge d’une potentielle rhabdomyolyse)
- Kaliémie ++ (dans le cadre de la rhabdomyolyse)
- Facteurs de risque :
- courant HT
- arrêt cardiaque préhospitalier
- brûlures du 3e degré
- syndrome de loge
- Recherche de lésions traumatiques et propres à l’électrisation HT, en particulier si atteinte pariétale
- Si douleur ostéo-articulaire ou impotence fonctionnelle
- Indiquée chez la femme enceinte si elle n’a pas été réalisée antérieurement
- Si crise d’épilepsie (mais souvent non contributif)
- Tout électrisé doit avoir une consultation médicale et un ECG
- Couper le courant ou dégager la victime avec un instrument non conducteur
- Pour les courants HT, la coupure de courant est l’affaire des pompiers ou d’EDF
- Brûlures par arc ou par flash = règle des 9 de Wallace
- Modalités de remplissage en cas de brûlures électrothermiques :
- 20 mL/kg en 1 heure de Ringer Lactate ou NaCl 0,9%
- 8 à 12 mL/ % BSA/kg de Ringer Lactate ou NaCl 0,9% dans les 24 premières heures
- si PAM < 70 mmHg malgré remplissage (1) : HEA 20 mL/kg
- objectif de diurèse : 2 mL/kg/h
- O2 par masque facial à haute concentration chez tout brûlé grave
- Antibioprophylaxie inutile, vaccination antitétanique à jour
- Correction impérative de toute hypovolémie :
- au moins 7 mL/kg/% de surface brûlée de cristalloïdes
- modalités de remplissage :
- 20 mL/kg en 1 heure de Ringer Lactate ou NaCl 0,9%
- ± sérum bicarbonate 0,5 mEq/kg/h si myoglobinurie importante
- en cas de non réponse rapide, mannitol 25g en dose de charge puis 12,5 g/h
- objectif de diurèse : 2 mL/kg/h
- Maintenir pH urinaire > 7
- Corriger l’hyperkaliémie (majorée par l’acidose), pouvant être très rapidement menaçante. L’utilisation des sels de calcium n’est recommandée que lors de cette circonstance
- Les diurétiques de l’anse, potentiellement délétères, ne sont utilisés qu’en cas de surcharge pulmonaire
- Intubation endotrachéale et ventilation mécanique en cas de brûlures d’une superficie > 60% de la surface corporelle, ou de détresse respiratoire installée ou imminente
- Attention à la succinylcholine (hyperkaliémie menaçante possible)
- Tout électrisé est un traumatisé du rachis potentiel => immobilisation adaptée
- Immobilisation des articulations en position fonctionnelle stricte (++)
- Si oedème important de membre dès l’admission, avec douleur, pâleur, absence de pouls, paresthésies ou pressions élevées, ce d’autant plus, que l’oedème tissulaire est majoré par le remplissage, et que la durée de transfert est longue, sinon discutée dans les 6 premières heures
- Une exploration abdominale et thoracique doit être envisagée systématiquement lors de brûlures de la paroi, TDM (++)
- Correction d’une hypothermie
- Traitement de la douleur
- Pas d’anticoagulation à dose hypo-coagulante : risque hémorragique non négligeable
- Les bradycardies répondent bien à l’atropine
- Une brûlure mineure au niveau de la commissure labiale doit être évaluée dans les 24h par un chirurgien plastique, en raison du risque de cicatrice avec atteinte fonctionnelle
- Palpation des pouls (vasospasmes périphériques, thromboses vasculaires, artérielles ou veineuses, ruptures artérielles, précoces ou retardées, pouvant survenir jusqu’à 6 semaines après l’accident) ; les atteintes vasculaires participent à l’installation des syndromes de loge
- PA, FC, SpO2/h
- Monitoring cardiaque, sauf pour :
- courant BT
- absence d’antécédent médical cardiovasculaire
- pas de perte de conscience
- ECG initial précoce normal ou identique à un ECG antérieur
- examen clinique normal en dehors d’une brûlure mineure
- Diurèse :
- objectif 2 mL/kg/h
- apparition d’urines couleur porto (myoglobinurie)
- Le monitoring foetal n’est pas indiqué en dessous de 20 semaines de gestation
- Un monitoring par cardiotocographe est indiqué pendant 4 heures après tout traumatisme associé même mineur
- Les indications de monitoring cardiaque pour la mère doivent comprendre un monitoring par cardiotocographe pendant la même durée
- Un nouveau doppler foetal doit être réalisé 2 semaines après, à la recherche d’une mort foetale tardive
- Post arrêt cardiaque
- Anomalie de l’examen neurologique d’origine centrale ou lésion médullaire
- Brûlure sévère (2e, 3e degré > 10% de la surface corporelle)
- Atteinte viscérale ou vasculaire extensive
- Patients présentant une atteinte d’organe spécifique
- Patients dont la situation est rapidement évolutive sur quelques heures
- Absence d’ATCD, de trouble cardiaque ou neurologique dans les heures qui suivent l’accident
- Brûlures superficielles et de petite étendue (sauf lésions circulaires, de la bouche…)
- Victime vivant dans un contexte familial et social favorable
- Informer l’entourage et le patient des possibilités de progression des lésions dans les heures qui suivent et de la nécessité d’une nouvelle évaluation médicale
- La chute d’escarre, habituellement entre le cinquième et le neuvième jour mais jusqu’à 2 semaines après l’accident, peut provoquer une hémorragie substantielle dans 10% des cas (en informer le patient et l’entourage et lui apprendre la conduite à tenir dans ce cas)
- Prescrire un arrêt de travail et informer le patient de la nécessité d’observer une période de repos
- Nécrose myocardique parfois étendue aux tissus de conduction et aux parois des artères de gros et petits calibres
- Occlusion d’une artère coronaire rare : elle ne doit faire poser l’indication d’une revascularisation, qu’après confirmation angiographique, étant donné le risque de la thrombolyse
- Régressives dans 2/3 des cas
- Courant HT : 23.3% de fractures associées et 16.3% de polytraumatismes
- Les fractures représentent 1% des complications par courant BT et 9% par courant HT
- 4% des complications par courant HT et 1% des complications par courant BT Incidence varie de 0% à 25%
- L’élévation des enzymes musculaires dont les CPK, n’est pas significativement corrélée au risque de myoglobinurie ou d’IRA
- Myoglobinurie présente chez 18.8% à 70% des patients électrisés par un courant HT et chez 4% en BT
- Lié à un TDR ventriculaire (8% FV), à un passage du courant par l’encéphale ou à un traumatisme crânien par chute (18%)
- Le pronostic est bon en dehors des anoxies
- De l’intensité du courant (I) mesurée en Ampère (A)
- De la tension du courant (U) mesurée en Volt (V)
- Du temps de passage mesuré en seconde
- De la fréquence du courant mesurée en Hertz (Hz) pour le courant alternatif
- De la surface de contact
- De la résistance ou impédance (selon que le courant est respectivement continu ou alternatif) mesurée en Ohm (O)
- De l’énergie transformée (sous forme thermique, mécanique, électromagnétique) mesurée en Joule (J)
- Du trajet du courant dans l’organisme
- L’intensité du courant (I) traversant le corps, est proportionnelle à la tension (U) de la source de courant et inversement proportionnelle à la résistance totale ou impédance (R) du corps [Loi d’Ohm : I (A) = U (V) / R (O)] :
- 10 à 26 mA : seuil de lâcher (let-go current) à partir duquel une victime ne peut détacher sa main d’un conducteur, en raison de la contraction des muscles fléchisseurs, pouvant aller jusqu’à la tétanisation
- 20 à 50 mA ou 30 mA pendant 30 sec : seuil de paralysie respiratoire pouvant entraîner un arrêt respiratoire
- 50 à 100 mA ou 40 mA pendant 3 sec : seuil de FV, devenant irréversible pour une intensité de 75 mA pendant 1 sec
- 2 A ou 1 A pendant 25 ms : arrêt cardiaque par asystolie
- La résistance de la peau, au niveau des surfaces de contact, diminue d’un rapport de 100 avec l’humidité
- La résistance des tissus, sous la dépendance de la concentration en électrolytes, décroît dans l’ordre suivant : os, graisse, tendon, muscle, vaisseau, sang, nerf
- La résistance des organes est 40 fois inférieure à celle de la peau
- L’énergie électrique est principalement transformée en énergie thermique selon la loi d’ OHM et de Joule : [W (dégagement de chaleur en joule) = R I² t ]
- Elle entraîne une thermocoagulation des tissus voire une carbonisation
- Il détermine le risque d’atteinte des organes profonds, en particulier cardiaque
- Le courant électrique produit des lésions membranaires par formation de pores dans la couche phospholipidique
- Ce phénomène intervient, entre autre, dans la genèse des lésions musculaires profondes et des perturbations neurologiques périphériques
- Si les pores sont larges et nombreux, la membrane est détruite irréversiblement et la cellule évolue vers la nécrose
- L’aggravation dans les heures et premiers jours qui suivent, semble être la conséquence des phénomènes locaux liés à la nécrose cellulaire
- Vasoconstriction rénale
- Diminution du coefficient de filtration glomérulaire
- Atteinte tubulaire dont une part est obstructive par la myoglobine et l’hémoglobine liées à la rhabdomyolyse
- Phénomènes humoraux (catécholamines, angiotensine, aldostérone, vasopressine, radicaux libres), plus rarement secondaires à l’atteinte parenchymateuse directe ou par lésions vasculaires liées au passage du courant.
- Mécanisme le plus précoce est en rapport avec l’hypovolémie (++)
- De mécanismes plus ou moins associés :
- brûlures électriques liées à l’effet thermique du courant (effet JOULE), par flash, par arc, par ignition des vêtements, fonte ou projection de métaux, par inhalation de gaz chauds
- Les lésions des tissus profonds sont d’autant plus importantes que les tissus traversés offrent une faible résistance et difficiles à apprécier (12,9%)
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