Objectifs
Savoir repérer les éléments sémiologiques permettant d’identifier l’importance du risque suicidaire.
Mettre en place les mesures nécessaires pour éviter un passage à l’acte suicidaire.
Organiser une prise en charge qui assure la protection du patient.
Gérer le patient tant du point de vue psychiatrique que médico-légal et vital.
Définition
• L’OMS définit l’acte suicidaire ainsi : « Tout acte délibéré, visant à accomplir un geste de violence sur sa propre personne (phlébotomie, précipitation, pendaison, arme à feu…) ou à ingérer une substance toxique ou des médicaments à une dose supérieure à la dose reconnue comme thérapeutique. »
• La définition ne concerne pas les actes habituels comme les conduites addictives (alcool, drogues.), ainsi que les automutilations répétées et les refus de s’alimenter.
• Vocabulaire :
– « Suicidé » désigne le sujet décédé par suicide.
– « Suicidant » désigne le sujet n’ayant pas réussi son passage à l’acte.
– « Suicidaire » désigne le sujet qui pense au suicide ou qui planifie un passage à l’acte de cette nature.
Le processus suicidaire comporte quatre temps : • 1er temps : idéation.
• 2e temps : rumination.
• 3e temps : cristallisation.
• 4e temps : passage a l’acte.
Signes
• Certains signes évoquent une pathologie dépressive sévère
– Troubles de l’humeur.
– Troubles du comportement.
– Troubles somatiques.
– Troubles anxieux.
– Troubles idéatoires.
• Chez les personnalités psychotiques, le passage à l’acte suicidaire survient lors d’un raptus anxieux majeur ou téléguidé par des hallucinations auditives.
• L’alcool et les toxiques facilitent le passage à l’acte car ils ont un effet désinhibiteur.
• La différenciation des conduites suicidaires entre adultes et adolescents est que ces derniers peuvent avoir des conduites ordaliques qui sont de véritables défis à la mort.
La gravité du risque suicidaire n’est pas liée au mode de passage à l’acte (phlébotomie, intoxication aiguë médicamenteuse, ingestion de toxiques, pendaison, etc.). Un moyen qui semble peu létal (absorption de benzodiazépines) peut cacher un réel risque suicidaire à évaluer.
Premiers gestes – Questions au patient
La crise suicidaire est une situation de souffrance extrême dont le risque majeur est le passage à l’acte (Conférence de consensus, HAS). Si la crise suicidaire n’est pas impulsive, le geste peut l’être.
Interrogatoire, entretien
Aborder le patient avec empathie. Le patient doit ressentir la disponibilité.
• Toujours vouvoyer la personne quel que soit l’âge.
• Permettre l’expression des émotions.
• Pratiquer la fermeté bienveillante.
• Récuser la notion de chantage : la dimension d’appel doit être considérée comme un facteur de meilleur pronostic, dans la mesure où elle montre la persistance d’une relation.
• Ne pas culpabiliser ou juger la personne.
• Ne pas faire des promesses que l’on ne peut pas tenir.
• Ne pas mettre au défi du passage à l’acte.
Ne jamais banaliser le geste.
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• S’informer des tentatives de suicide antérieures et de leurs modalités.
• Faire préciser l’existence ou non d’un plan de suicide actuel.
• Lors d’un entretien d’évaluation, toujours évaluer la projection dans l’avenir dont l’absence traduit le fait qu’un sentiment de dévalorisation de l’individu se met en place :
– Que voulez-vous faire ?
– Regardez-vous les informations ?
– Que voulez-vous faire plus tard ?
Premiers gestes
• Évaluer la situation avec la plus grande vigilance et réagir en fonction de l’évolution des manifestations suicidaires.
• Prévenir le médecin afin de réajuster les modalités de surveillance en cas d’évolution des manifestations suicidaires pendant le temps aux urgences ou en service d’hospitalisation de courte durée.
• Protéger, établir un lien de confiance.
• Identifier tous les autres soutiens (accompagnants, famille, amis, etc.).
• Enlever les moyens suicidaires à disposition.
• Rester avec la personne : si des signes d’aggravation se manifestent, prévenir le médecin des urgences ou le psychiatre.
• Demander de mettre une tenue de l’hôpital (faire un inventaire et subtiliser les vêtements pour réduire le risque de fugue).
• Expliquer l’intérêt d’une évaluation somatique.
Prise en charge – Bilans, traitement
La recherche d’éléments à l’origine du geste suicidaire ne doit pas être menée de façon systématique et intrusive.
l faut savoir que le geste impulsif est majoritaire chez les adolescents, donc l’évaluation du risque de récidive est plus difficile que chez les adultes.
Bilan
Évaluation du risque suicidaire
L’évaluation du potentiel suicidaire utilise trois indicateurs :
• risque ;
• dangerosité ;
• urgence.
Ces indicateurs permettent de déterminer le degré de perturbation de la personne afin d’instaurer une intervention appropriée.
Éléments importants de l’évaluation du potentiel suicidaire :
• Le niveau de souffrance : désarroi ou désespoir, repli sur soi, isolement relationnel, sentiment de dévalorisation ou d’impuissance, sentiment de culpabilité, anxiété, insomnie.
• Le degré d’intentionnalité : idées envahissantes, rumination, recherche ou non d’aide, dispositions envisagées ou prises en vue d’un passage à l’acte (plan, scénario).
• Les éléments d’impulsivité : tension psychique, instabilité comportementale, agitation motrice, état de panique, antécédents de passage à l’acte, de fugue ou d’actes violents.
• Un éventuel élément précipitant : conflit, échec, rupture, perte.
• La présence de moyens létaux à disposition : arme à feu, médicaments, objets qui peuvent être détournés de leur fonction.
• La qualité du soutien de l’entourage proche : capacité de soutien familial ou amical, ou renforcement du risque dans le cas de familles « à transaction suicidaire ou mortifère ».
Réalisation pratique de l’évaluation
Évaluer le potentiel suicidaire sur trois critères : le risque, l’urgence et la dangerosité.
Échelle d’évaluation du risque suicidaire | 1 | Homme | 1 point |
2 | Âge < 19 ans ou > 45 ans | 1 point | |
3 | Déprimé ou désespéré | 2 points | |
4 | Antécédent de TS | 1 point | |
5 | Éthylisme, abus de substances actuel | 1 point | |
6 | Jugement détérioré par psychose ou confusion | 2 points | |
7 | Séparé, divorcé ou vie isolée | 1 point | |
8 | ntention exprimée ou geste organisé | 2 points | |
9 | Absence de lien social significatif | 1 point | |
10 | ncapacité de garantir ses gestes ultérieurs | 2 points | |
Le total permet de donner une évaluation du risque suicidaire Faible : 0-4 ; Moyen : 5-9 ; Élevé : 10-14 |
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Évaluation de l’urgence | Faible | Pas de scénario suicidaire précis | |
Persistance de stratégies pour faire face à la crise | |||
Recherche de solutions à ses problèmes | |||
Moyenne | L’intention du suicide est claire | ||
L’exécution du scénario est reportée | |||
Ne voit pas d’autre recours que le suicide pour cesser de souffrir | |||
A besoin d’aide et se trouve isolé(e) | |||
Élevée | Le passage à l’acte est prévu < 48 h. | ||
Rationalisation de la décision, patient très émotif, agité et troublé | |||
mmobilisation par la dépression ou grande agitation | |||
Souffrance omniprésente ou non exprimée | |||
solement très important | |||
Évaluation de la dangerosité | Létalité du moyen utilisé ou envisagé | Par exemple : arme à feu dangerosité élevée | |
Accessibilité de moyens létaux | Par exemple : détient une arme à feu dangerosité élevée | ||
Accumulation de facteurs de risques | Par exemple : antécédents de TS + maladie chronique + grand âge dangerosité élevée | ||
Présence d’un facteur précipitant | Par exemple : date anniversaire d’un deuil, séparation dangerosité élevée | ||
Appréciation de la quantité et qualité du soutien social | La personne est accompagnée et soutenue ou non par au moins une personne dangerosité faible | ||
Projet de soin | Bonne qualité de l’adhésion au projet de soin dangerosité faible | ||
Surveillance – Évaluation
Évaluation du soin
• Surveiller la prise médicamenteuse : aucun stockage.
• Absence d’objets dangereux.
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• Vérifier la fermeture des fenêtres.
• Prévenir les fugues par l’observation du comportement de la personne en situation de crise suicidaire.
Mise en place d’un suivi
Une bonne évaluation exige de poser des questions précises : parler du suicide au cours d’un entretien n’augmente pas statistiquement le risque suicidaire.
Les conclusions de l’évaluation du potentiel suicidaire d’un patient doivent déboucher sur une intervention adaptée et rapide au sein d’une équipe pluridisciplinaire dès les urgences.
Accès à des moyens létaux Faible soutien social Jugement pauvre Ne peut faire un contrat pour sa sécurité
Risque suicidaire élevé : hospitalisation libre ou hospitalisation à la demande d’un tiers
Pas d’accès à des moyens létaux Bon soutien social
Bon jugement
Capable de faire un contrat pour sa sécurité
Évaluer les troubles psychiatriques et les facteurs de stress
Avis du psychiatre avant la sortie des urgences pour orientation
Schéma décisionnel devant un processus suicidaire.
Fiche 101, Contention et sédation.
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