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Prise en charge des plaies aux urgences

Objectifs

Évaluer toute plaie afin d’éviter de méconnaître une lésion profonde ou de s’exposer à des complications infectieuses ou esthétiques.

Signes

Devant une plaie, l’IOA doit rechercher les signes de gravité ou les élé­ments devant rendre prioritaire la prise en charge du patient1 :

• Mécanisme lésionnel :

–    Plaies pénétrantes : arme blanche, arme à feu.

–    Plaies par injection sous pression.

–    Morsures complexes.

–    Amputations partielles ou complètes.

–    Brûlure : cf . Fiche 34.

• Siège :

–    Tête et cou :

–     Face : nerf trijumeau, nerf facial, globe oculaire, voies lacrymales, canal de Sténon, vaisseaux faciaux, muscle releveur de la paupière supérieure.

– Cuir chevelu : fracture de la voûte crânienne.

– Cou : axes vasculaires, trachée, cervicales.

–    Abdomen : intestin, rate, vessie, péritoine.

–    Thorax : médiastin, poumons, gros vaisseaux, rachis…

–    Racine des membres : lésions articulaires, tendineuses ou vasculo- nerveuses.

–    Main et pied : atteintes fonctionnelles ++.

• Présence de signes de détresse vitale :

–    Hémodynamique :

–     Pouls > 120/min (± hémorragie extériorisée) Prise en charge immé­diate (bloc opératoire).

– État de choc (PAS < 90 mm Hg à confronter à la PA habituelle).

–    Respiratoire :

– FR > 25/min.

– Cyanose périphérique.

– SpO2 < 90 %.

1. Conférence de consensus sur la prise en charge des plaies aux urgences (hors brûlu­res et plaies chroniques). SFMU, 2005.

–     Neurologique : trouble de la conscience + plaie du cuir chevelu TC associé ?

• Troubles en aval de la lésion :

–     Douleur, froideur, blancheur ou cyanose du membre.

–     Perte des pouls (SpO2 non captée).

–   Paresthésie ou paralysie.

•  EVA > 6 (critère de priorité, non de gravité).

•     Syndrome infectieux systémique ou infection locorégionale extensive ou infection locale non contrôlée par l’antibiothérapie.

Ces situations prioritaires doivent répondre à des protocoles de prise en charge et faire appeler le médecin, dès l’accueil du patient.

Premiers gestes – Questions au patient

• L’IOA évalue objectivement (dépose des pansements) et décrit les lésions : taille, profondeur apparente, type, souillures, gonflement, déformation, perte de substance.

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Les corps étrangers ne doivent pas être mobilisés.

Les membres amputés sont conservés dans un sac propre et réfrigéré sans contact avec la glace.

• Ôter précocement les bijoux en aval et sur les zones lésées.

• Évaluer la douleur et la traiter selon protocole.

Laisser à jeun tout patient présentant une amputation ou un critère de gravité (cf. « Signes »).

• Laver la plaie au NaCl 0,9 %.

• Réaliser un pansement sommaire occlusif, voire compressif.

•     Installer le patient en fonction des éléments relevés lors de l’entretien d’accueil :

–     Immobiliser un membre suspect de fracture.

–     Respecter la position fonctionnelle, notamment des articulations.

–     Plaie du thorax : position semi-assise.

–     Plaie de l’abdomen : décubitus dorsal, jambes repliées.

En cas d’hémorragie, exercer une compression locale et mettre le membre au zénith.

• L’IOA complète son interrogatoire.

196

• Paramètres vitaux :

–   pouls, PA, FR, SpO2 ;

–   coloration, marbrures ;

–   évaluation neurologique ;

–   pouls périphériques en aval de la plaie.

•   Outre les signes de priorisation (cf. « Signes »), recherche d’éléments influençant la prise en charge :

–   traitement par corticoïdes, immunosuppresseurs, anticoagulants, chi­miothérapie, antiagrégants ;

–   antécédents : troubles trophiques, cicatrice chéloïde.

•   En cas de lésion due à un courant électrique, la prise en charge est prio­ritaire :

–   prise des constantes ;

–   réalisation systématique d’un électrocardiogramme ;

–   recherche d’un point d’entrée et d’un point de sortie ;

–   surveillance par électrocardioscope.

S’il existe des signes de gravité ou une atteinte profonde associée

•   Dans certains cas, il est nécessaire d’organiser une prise en charge au bloc opératoire en même temps que ces premiers gestes ;

–   soit que le geste chirurgical doive être effectué sans délai ;

–   soit que l’indication de celui-ci soit évidente.

•   L’avis médical dès l’accueil facilite, par des décisions rapides d’imagerie et de soins locaux d’attente, le déroulement du passage aux urgences. C’est le cas, par exemple :

–   des plaies souillées ;

–   des corps étrangers visibles en place ;

–   d’une amputation partielle ;

–   d’une brûlure.

Premiers soins permettant l’attente de la prise en charge médicale

Si la plaie est à risque tétanigène (présence de particules de terre), le statut vaccinal du patient doit être contrôlé. L’interrogatoire n’étant pas fiable dans ces situations, un test de dépistage rapide des anticorps antitétaniques peut être réalisé aux urgences (en concertation avec le laboratoire de biologie), permettant de connaître la protection du patient. Devant une plaie à risque tétanigène et un patient non protégé, une immunoprophylaxie et un vaccin antitétanique doivent être réalisés aux urgences.

• Devant toute plaie, dès l’accueil, une décontamination par un lavage est réalisée ; il s’agit d’un lavage à l’eau et au savon. Si le patient peut lui- même laver sa plaie, il sera installé devant le lavabo de la salle de soins.

Trois familles d’antiseptiques sont utilisées dans la pratique courante : les dérivés iodés, les dérivés chlorés et les biguanides.

l est impératif avant l’utilisation d’un antiseptique, de s’enquérir d’éven­tuels antécédents allergiques. Si le patient rapporte une allergie, une autre famille sera utilisée.

Prise en charge – Bilans, traitement

Installation du patient

Le patient doit être installé confortablement sur un brancard pour l’exa­men clinique. Le patient est installé en position allongée ; si la plaie siège sur le membre supérieur, celui-ci est disposé sur la table à suture à hauteur du brancard.

• La salle d’examen doit permettre au médecin de tourner autour du brancard.

• Scialytique orientable.

• Brancard à hauteur réglable.

• Matériel de suture (à usage unique ou non).

• Instruments spécifiques.

• Fil à peau, colle dermique, agrafeuse.

• Collecteurs de déchets.

• Point d’eau.

Prise en charge de l’urgence vitale Pose d’une voie veineuse périphérique.

Jamais en aval d’une plaie de membre.

Examens complémentaires

Radiographie, scanner…

Examen de la plaie

Préparer le matériel nécessaire à l’opérateur

•  Gants stériles.

•  Surblouse.

• Lunettes de protection.

• Coiffe chirurgicale.

• Masque chirurgical.

Lavage, désinfection de la plaie

• Il est recommandé de réaliser le lavage avec du NaCl 0,9 % en raison du risque de lyse cellulaire.

• En cas de souillure importante, un premier lavage à l’eau et au savon de la zone lésée a été réalisé auparavant.

• L’utilisation d’une seringue pour irrigation de la plaie avec du NaCl 0,9 % permet un lavage avec une pression plus importante et éli­mine mieux les souillures.

• Dans certains cas, pour compléter ce lavage, l’indication d’un brossage permet l’exclusion de corps étrangers adhérents. Il faut alors prévoir une analgésie au préalable.

• Une décontamination est ensuite réalisée de manière centrifuge. Il est utilisé le même antiseptique qu’au début de la prise en charge en res­pectant les compatibilités.

• Le rasage est à proscrire ; on peut utiliser la tondeuse avec parcimonie. Analgésie

• Pour certaines localisations, une analgésie locorégionale (ALR) est réali­sée, préalablement à l’installation. Il s’agit d’une analgésie de la gaine des fléchisseurs pour un doigt, une anesthésie des nerfs radial, médian ou ulnaire pour les plaies des mains, ou des blocs de la face pour les plaies de cette région.

• Une analgésie par mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA), peut également être proposée soit en complément de l’ALR, soit seul pour des gestes d’une durée inférieure à 1 h (plaies superficielles, pansements…).

•  En attente d’une exploration immédiate ou d’un transfert au bloc, lorsqu’une plaie d’un membre saigne au point de gêner l’exploration, on installe un garrot pneumatique. Le membre est mis en position ver­ticale puis, après une minute, le garrot est gonflé pour être maintenu à une pression supérieure à la pression systolique du patient. L’heure de pose du garrot est consignée dans le dossier médical. L’utilisation de ce matériel doit faire l’objet d’une procédure de service.

Exploration des lésions

•  Le premier temps de l’examen médical est la recherche des lésions pro­fondes potentielles ; les tests tendineux et vasculo-nerveux d’aval sont réalisés.

• Dans certains cas, l’exploration justifie une hémostase de la plaie. Elle peut être effectuée par des points ou par un bistouri électrique. L’utili­sation d’un bistouri électrique impose des règles précises de manipula­tion, devant être connues des soignants (procédure de service).

• Si le médecin constate une lésion profonde, même partielle, le patient sera confié au chirurgien pour une prise en charge au bloc opératoire :

–     Comme pour les autres situations, un pansement d’attente est réalisé.

–     Le transfert du patient est organisé, l’acte opératoire préparé en con­certation avec les équipes chirurgicales et anesthésiques.

–     Le bilan préopératoire répond aux règles émises par la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) ; il n’existe pas de bilan préopé­ratoire systématique.

–     Conditionner le patient pour le bloc et préparer le dossier.

–     Le rassurer et faire prévenir la famille.

•     Appel du spécialiste :

–     Plaie du globe oculaire.

–     Embarrure, fuite de LCR.

–     Plaie de paupière dépassant le plan cutané ou intéressant le bord libre.

–     Plaies profondes des joues, plaie extensive de la langue et de la cavité buccale.

–     Plaies transfixiantes de l’oreille et du nez.

–     Plaies avec perte de substance.

•     Si l’exploration a pu être complète et élimine une lésion profonde, la réparation cutanée est réalisée aux urgences.

L’exploration d’une plaie aux urgences impose certaines règles d’hygiène à mettre en œuvre, une installation particulière du patient et du médecin :

•  Préparer la table de suture avec matériel de suture et anesthésie.

•  Assister le médecin.

•     Le lavage des mains comprend un lavage simple effectué avec un savon non antiseptique et la désinfection des mains effectuée avec un savon antiseptique type Scrub ou par une friction alcoolique par solution hydro-alcoolique (SHA).

LÉSIONS TRAUMATIQUES

Prise en charge des plaies aux urgences

MATÉRIEL

Le matériel nécessaire à l’exploration et à la suture d’une plaie comprend : • porte-aiguilles ;

• pince à griffes ;

• pince(s) hémostatique(s) (une à deux) ;

• paire de ciseaux ;

• cupule pour l’antiseptique ;

• compresses stériles ;

• champ perforé stérile à usage unique ;

• matériel pour l’anesthésie locale : cupule, seringue à usage unique, aiguille intradermique ou intramusculaire, aiguille à biseau court et, si besoin, un neurostimulateur.

Parfois, le médecin doit avoir à disposition du matériel complémentaire ;

• écarteurs ;

• système pour un drainage, crins de Florence.

Le médecin indique le matériel de fermeture ;

• fil résorbable ou non, ainsi que sa taille du 6/0 au 2/0 (le diamètre étant inversement proportionnel au premier chiffre) ;

• ou un autre matériel de fermeture (agrafes, colle, sutures adhésives).

Réparation cutanée

La suture permet de maintenir le rapprochement des deux berges d’une plaie pour faciliter la cicatrisation. Elle justifie de rapprocher chaque plan de la profondeur à l’épiderme.

Lorsque la fermeture des plans profonds ne peut être complète, il sera nécessaire d’installer un drainage par des crins de Florence. Il s’agit de fils monobrins non résorbables de gros diamètre et peu flexibles. Trois à qua­tre d’entre eux sont installés au fond de la plaie, dans son grand axe. Une fois la suture terminée, les extrémités des crins sont nouées avec les brins restants. Sous

couvert d’un pansement légèrement compressif, ce drainage est laissé en place 2 à 4 jours.

Toutes les plaies ne justifient pas d’une technique de fermeture. La cicatri­sation dirigée, qui suit la cicatrisation spontanée du patient, est indiquée lors d’une perte de substance. Elle nécessite alors un suivi en consultation pour la réfection des pansements et leur choix en fonction de l’évolution du bourgeon.

201

  Après la fermeture de la plaie

• La zone cutanée est nettoyée, pour éliminer les débris et le sang restés adhérents en périphérie de la plaie.

• Si la plaie se trouve sur une zone de frottement, un pansement humide ou gras est réalisé. En dehors de ces situations la plaie est laissée à l’air libre.

• Des antalgiques doivent être prescrits pour les deux premiers jours. Antibiothérapie

La décision d’instaurer un traitement antibiotique doit tenir compte des facteurs de risque d’évolution vers une infection et doit être discutée dans les situations suivantes :

• Délai prolongé de prise en charge.

• Présence de souillure (en particulier terre et débris organiques).

• Présence de corps étrangers.

• Certaines plaies par morsures.

• Mécanisme de la plaie par écrasement ou lacération avec présence de tissus dévitalisés.

• Ischémie locale, état d’immunodépression, diabète.

I       n’y a pas lieu de faire de prélèvements bactériologiques systématiques. En revanche, l’apparition de signes régionaux ou généraux d’infection, comme une lymphangite, des adénopathies ou de la fièvre, doit faire prati­quer un prélèvement et débuter une antibiothérapie d’une durée de 10 jours.

Lors des morsures animales, le patient est dirigé vers un centre antirabique pour une décision ou non de traitement contre la rage.

La mise en place d’un pansement adapté (Tulle gras, compresses) et suffisamment protecteur d’un choc secondaire est un temps infirmier essentiel à l’issue de la suture. Respecter la position anatomique et la flexion. Ne pas faire de garrot avec le bandage.

Sortie

• Lors de la sortie du patient, il faut lui expliquer les suites :

–     Réalisation du premier pansement en consultation ou par le patient lui- même.

–  Ablation de fils à réaliser.

–     Surveillance de l’état de la plaie, avec compréhension des signes de surinfection.

• Les signes évoquant une complication doivent amener le patient à con­sulter en urgence. Ils sont à connaître par le patient et l’infirmier(e) organisateur de l’accueil :

–    Rougeur.

–    Douleur anormale.

–    Coloration anormale de la plaie ou des extrémités.

–    Écoulement de sang, de liquide, de pus.

–    Gonflement.

–    Fièvre, frissons.

–    Ouverture de la plaie.

–    Odeur désagréable.

–    Crépitation (bruit de pas dans la neige).

•   L’ablation des fils est à programmer dès la sortie (cf. tableau).

•   Une fiche de conseil est remise au patient ; elle comprend :

–    Suites des soins à réaliser.

–    Soins locaux.

–    Ablation des fils, drains, agrafes.

–    Signes évoquant une complication et imposant une consultation.

Délai préconisé d’ablation des fils en fonction de la localisation
Visage5 jours
Paupières3 jours
Cou10 à 14 jours
Oreille10 à 14 jours
Scalp6 à 8 jours
Tronc15 à 21 jours
Main10 à 14 jours
Membre inférieur15 à 21 jours
Pied12 à 14 jours
Pénis8 à 10 jours
Membre supérieur12 à 14 jours

La conférence de consensus réalisé par la Société française de médecine d’urgence propose une fiche modèle de surveillance des plaies, ainsi qu’une fiche spécifique de prise en charge par l’IOA (p. 44 du document : .

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