Spécialité : infectieux /
Points importants
- 500 millions cas/an dans le monde ; 4 400 cas de paludisme d’importation en France en 2007
- Une vingtaine de décès/an en France
- Prophylaxie (chimique + médicamenteuse) ne garantit pas une protection absolue contre l’infection
- Toute fièvre au retour des tropiques doit être considérée à priori comme un paludisme jusqu’à preuve du contraire
- Environ 3% des paludismes à P. falciparum sont observés au-delà des 2 mois suivant le retour
- L’interrogatoire (prophylaxie, zones de voyage) est essentiel. La confirmation est para-clinique (frottis/goutte épaisse)
- La prise en charge peut aller de l’ambulatoire à la réanimation, elle est fonction de la gravité
Présentation clinique / CIMU
SIGNES FONCTIONNELS
Généraux
- Fièvre (+++) :
- peut être absente dans 30 à 56% des cas => rechercher présence de fièvre dans les jours précédents :
- fièvre tous les 2 jours avec P. vivax et ovale = fièvre tierce bénigne
- fièvre tous les 3 jours avec P. ovale = fièvre quarte
- P. falciparum = fièvre continue ou tierce maligne
- peut être absente dans 30 à 56% des cas => rechercher présence de fièvre dans les jours précédents :
- Sueurs
- Douleurs diffuses
- Asthénie
Digestifs
- Douleur abdominale
- Troubles digestifs (diarrhée, vomissements)
Neurologiques
- Céphalées
CONTEXTE
Circonstances de survenue
- Retour d’une zone d’endémie :
- P. falciparum et P. malariae : Afrique, Amérique, Asie
- P. ovale : uniquement africain [Afrique de l’ouest et golfe de Guinée, rarement en Afrique de l’est]
- P. vivax : Afrique, Amérique, Asie
- Absence de chimioprophylaxie ou mal suivie (arrêt dès le retour +++)
EXAMEN CLINIQUE
- Hétérogénéité des symptômes
Cutané
- Pâleur
- Signes hémorragiques (pétéchies, hématomes…)
Digestif
- Vomissements
- Diarrhée
- Hépatomégalie, splénomégalie
- Ictère
Neurologique
- Confusion
- Agitation
- Convulsion
- Signes méningés
- Coma
Cardio-vasculaire
- Tachycardie
- Etat de choc
Pulmonaire
- Œdème pulmonaire
Rénal
- Oligo-anurie
- Urines foncées (hémoglobinurie)
EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES
- Glycémie capillaire < 2,2 mmol/L = critère de gravité
- ECG
CIMU
Tri 1 à 2 en fonction de la gravité clinique
- Tri 1 (dû au Falciparum) si :
- HoTA
- troubles de conscience
- convulsions
- troubles psychiatriques
- OAP
- troubles hémorragiques
- Tri 2 dans les autres cas
Signes paracliniques
BIOLOGIQUES
- NFS, plaquettes (anémie hémolytique, leuconeutropénie, thrombopénie [grave si < 50 000])
- TP, TCA
- Ionogramme sanguin (hypoglycémie rare sauf chez la femme enceinte et l’enfant) et urinaire
- Urémie, créatininémie (insuffisance rénale aiguë)
- ECBU
- GDS (acidose métabolique)
- Lactates si état de choc
- Bilan hépatique complet
- 2 hémocultures
- Frottis / goutte épaisse + parasitémie :
- un frottis négatif n’élimine pas le diagnostic
- à renouveler lors d’un pic fébrile
IMAGERIE
Radio de thorax face + profil
- Recherche de signe pour OAP
EEG et imagerie cérébrale en cas de signe focal ou de coma mal expliqué
Diagnostic différentiel
En fonction des signes associés
- Syndrome septique :
- infections bactériennes
- helminthiases invasives
- amibiase hépatique
- Diarrhée :
- salmonella
- shigella
- campylobacter
- yersinia
- hépatites virales
- rotavirus
- Hépatomégalie :
- leishmaniose viscérale
- amibiase hépatique
- hépatites virales
- Splénomégalie :
- typhoïde
- brucellose
- borrélioses
- trypanosome africaine
- leishmaniose viscérale
- Ictère/hépatite :
- typhoïde
- rickettsiose
- leptospirose
- hépatites virales
- EBV, CMV, HSV, arbovirus
- Signes neurologiques :
- typhoïde
- méningite bactérienne
- arboviroses
Traitement
TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER
Stabilisation initiale (accès palustre)
- Oxygénothérapie pour SpO2 > 95%
- Pose d’une voie veineuse et perfusion de NaCl 0,9% si déshydratation ou G5% 1 000 mL/24h si signes d’OAP
- Critères d’intubation :
- collapsus
- dyspnée avec hypoxémie majeure malgré oxygénothérapie
- troubles de conscience
- Si HoTA :
- expansion volémique (500 mL de Nacl 0,9%)
- si choc persistant malgré remplissage bien mené : noradrénaline IVSE (voir
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choc septique
) - transfusions indiquées si Hb < 6 g/dL ou intolérance ECG ; attention à ne pas aggraver ou entraîner un SDRA
- Traiter l’hypoglycémie (qui peut s’aggraver sous quinine)
Suivi du traitement
- Antipaludéen :
- à débuter immédiatement, sans attendre les résultats d’examens complémentaires, si forte suspicion diagnostique
MEDICAMENTS
Voie orale
- 1re ligne :
- Atovaquone + proguanil (Malarone) :
- 4 cps en 1 prise/j à renouveler 2 fois à 24 heures d’intervalle au cours des repas (soit 12 cps au total sur 48 heures)
- contre-indications : allergie, grossesse
- effets secondaires : nausées et vomissements.
- Artéméther + luméfantrine (Riamet / Coartem) :
- 4 cps en 1 prise à H0, H8, H24, H36, H48 et H60 (2 fois/j pendant 3j) avec prise alimentaire ou boisson avec corps gras
- contre-indications : grossesse et allaitement, troubles de conduction intra-ventriculaires de haut degré
- effets secondaires : céphalées, vertiges, troubles digestifs
- Atovaquone + proguanil (Malarone) :
- 2e ligne :
- méfloquine (Lariam) :
- 25 mg/kg en 3 prises espacées de 8 heures
- contre-indications : ATCD neuropsychiques, allergie, traitement par acide valproique, insuffisance hépatique sévère, grossesse
- effets secondaires : troubles digestifs, céphalées, vertiges ; troubles neuro-psychiques (dont convulsions) : rares mais potentiellement graves.
- quinine (Quinimax / Quinine Lafran / Surquina) :
- 8 mg/kg/8 heures pendant 7 jours, ne pas dépasser 2,5 g/j
- contre-indications : allergie, troubles de conduction de haut degré
- effets secondaires : cinchonisme : troubles digestifs, céphalées, acouphènes ; troubles du rythme (surdosage)
- méfloquine (Lariam) :
- 3e ligne :
- halofantrine (Halfan) :
- 25 mg/kg en 3 prises espacées de 6 heures, à jeun (en pratique 2cps x 3) + 2e cure à J7-J10 chez le non-immun à dose réduite. En milieu hospitalier (surveillance ECG notamment entre 2e et 3e prise)
- contre-indications : ATCD de troubles du rythme, hypokaliémie, médicament allongeant le QT, QTc allongé, insuffisance cardiaque, relais de méfloquine, grossesse.
- effets secondaires : cardiotoxicité : allongement QTc très fréquent ; troubles du rythme (rares/graves)
- halofantrine (Halfan) :
Voie IV
- Quinine :
- dose de charge (sauf si traitement antérieur par halofantrine, méfloquine ou quinine) : 17 mg/kg de quinine base sur 4 heures en IVSE, puis, 8 mg/kg de base (NB : 300 mg de chlorhydrate de quinine = 245 mg de quinine sel) en IVSE toutes les 8 h en continu
- contre-indications et effets secondaires : cf. quinine per os
- à relayer dès que possible par un antipaludique oral
Surveillance
CLINIQUE
- Conscience, PA, FC, T° /4h
PARACLINIQUE
Si quinine IV
- Contrôle quotidien de quinine plasmatique totale pendant 72 heures :
- à effectuer à la fin d’une perfusion de quinine
- taux efficace entre 10 et 12 mg/L
- ECG avant le traitement puis quotidiennement (surveillance QTc)
- Glycémie capillaire à surveiller durant l’administration de la dose de charge puis toutes les 4 heures (risque d’hypoglycémie surtout chez enfant et femme enceinte)
- Parasitémie à J3, J7 et J28
Devenir / orientation
CRITERES D’ADMISSION
En réanimation
Le paludisme grave est une urgence vitale qui met en jeu le pronostic vital. Le traitement ne se conçoit que dans une unité de réanimation. La présence d’un seul de ces critères impose l’avis du réanimateur :
- T° > 40°C ou < 36°C
- Défaillance neurologique : obnubilation, confusion, somnolence, prostration, coma avec Score de Glasgow score de Glasgow
< 11, convulsions - Défaillance respiratoire :
- si Ventilation Mécanique ou VNI
- si non ventilé PaO2 < 60mmHg et/ou SpO2 < 95% en air ambiant et/ou FR > 32/min
- OAP lésionnel
- Toute défaillance cardiocirculatoire :
- PAS < 80 mmHg
- patient recevant des drogues vasoactives quel que soit le chiffre de pression
- signes périphériques d’insuffisance circulatoire sans HoTA
- Convulsions répétées : au moins 2 par 24 heures
- Hémorragie
- Ictère : clinique ou bilirubine totale > 50 µmol/L
- Baisse du TP, CIVD
- Hémoglobinurie macroscopique
- Anémie hémolytique profonde :
- hémoglobine < 7 g/dL
- hématocrite < 20%
- thrombopénie
- Hypoglycémie : glycémie < 2,2 mmol/L
- Acidose :
- bicarbonates plasmatiques < 15 mmol/L
- ou acidémie avec pH < 7,35
- Toute hyperlactatémie
- Hyperparasitémie : dès que la parasitémie > 4%
- Insuffisance rénale :
- créatininémie > 265 µmol/L ou urée sanguine > 17 mmol/L
- et diurèse < 400mL/24h malgré réhydratation
Dans un service de médecine interne
- Les patients moins sévères mais à risque d’aggravation
- Les patients fragiles : patients âgés, comorbidité (insuffisance hépatique ou rénale, splénectomie, etc.)
- Indication à un traitement IV : vomissements, femme enceinte
- Parasitémie > 2% sauf si patient résidant depuis longtemps en zone d’endémie
CRITERES DE SORTIE
- Traitement ambulatoire possible si :
- absence de situation d’échec d’un premier traitement
- paludisme simple sans aucun signe de gravité clinique ou biologique
- absence de trouble digestif (vomissements, diarrhée importante…) qui pourrait compromettre le succès d’un traitement par voie orale
- parasitémie < 2%
- plaquettes > 50 000/mm³, hémoglobine > 10 g/dL, créatinémie < 150 µmol/L
- absence de facteur de risque :
- sujet physiologiquement âgé
- sujet fragilisé par une affection sous-jacente, notamment cardiopathie
- patient splénectomisé
- absence de grossesse
- patient entouré
- garantie d’une bonne observance et d’une bonne compréhension des modalités du traitement
- garantie d’une délivrance immédiate du traitement à la pharmacie
- résidence à proximité d’un établissement hospitalier
- possibilité d’une consultation de suivi à J3, J7 et J28
ORDONNANCE DE SORTIE
- Frottis-goutte épaisse à J3, J7 et J28
RECOMMANDATIONS DE SORTIE
- Revoir médecin traitant à J3 pour réévaluation
Mécanisme / description
- Le paludisme est une infection par un parasite. Il en existe 4 espèces :
- Plasmodium falciparum est l’espèce la plus pathogène et responsable des cas mortels
- Plasmodium vivax
- Plasmodium ovale se trouve en Afrique de l’ouest, ne tue pas mais peut entraîner des rechutes 4 à 5 ans après la primo-infection
- Plasmodium malariae a une distribution mondiale, ne tue pas mais peut donner des rechutes 20 ans après la primo-infection
- La contamination se fait par une piqure d’un moustique, l’anophèle femelle
- Le cycle parasitaire, chez l’homme, comprend 2 étapes :
- l’étape hépatique faisant immédiatement suite à la piqure : les parasites (sous forme sporozoites) gagnent le foie et s’y multiplient pendant 1 à 2 semaines ; les hépatocytes parasités éclatent libérant dans la circulation sanguine les mérozoïtes
- ceux-ci vont pénétrer dans les hématies, s’y transformer puis entrainer l’éclatement de l’hématie, c’est l’étape érythrocytaire
- Le cycle de maturation intra-érythrocytaire varie selon l’espèce et dure soit 48 heures (P. falciparum, P. ovale, P. vivax) soit 72 heures (P. malariae) rendant compte de la périodicité des accès fébriles
Bibliographie
- Prise en charge et prévention du paludisme d’importation à plasmodium falciparum-12e conférence de consensus en thérapeutique anti-infectieuse de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française-HIA Bégin, Saint Mandé-14 avril 1999.
- Révision 2007 conférence de consensus www.infectiologie.com
- Maladies infectieuses et tropicale, E. Pilly ; APPIT ; 22e édition 2010
Auteur(s) : Christian FULLEDA
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