Spécialité : pediatrie / toxicologie /
Points importants
- La théophylline est utilisée dans le traitement de l’asthme et des maladies obstructives pulmonaires
- La dose toxique est de 10 à 15 mg/kg après ingestion d’une dose unique (à partir de 3 g chez l’adulte)
- Fort risque de convulsions et de troubles cardiovasculaires, d’apparition rapide y compris dans l’heure qui suit l’ingestion
- Théophyllinémie considérée comme toxique si > 20 mg/L
Présentation clinique / CIMU
SIGNES FONCTIONNELS
Digestifs
La théophylline stimule les centres de vomissements et de sécrétion d’acidité gastrique. Ceci a pour conséquence:
- Douleur épigastrique
- Nausée, vomissements
- Diarrhée
- Hématémèse par syndrome de Mallory- Weiss
- Abdomen pseudochirurgical
Troubles neurologique
- Céphalée
- Agitation
- Tremblement, hypertonie
- Convulsions en rapport avec des concentrations > 100 µg/mL
Troubles cardio-vasculaires
- Tachycardie sinusale constante
- HoTA, collapsus, vasoplégie (effet bêta 2 adrénergique)
- Troubles du rythme (concentration > 35 µg/mL) par abaissement du seuil de l’excitabilité ventriculaire, réentrée, état hyperadrénergétique)
- supraventriculaire (ESA, TSA…)
- ventriculaire (ESV, TV, FV)
- trouble de la repolarisation avec inversion des ondes T.
- ces troubles sont favorisés par l’hypoxie et l’acidose
- Arrêt cardiaque par fibrillation ventriculaire
Détresse respiratoire
- OAP non cardiogénique
- Pneumonies d’inhalation.
CONTEXTE
2 types d’usage
- Accidentel
- Intentionnel
Prédisposition à la dépendance à la théophylline
Antécédents
- Asthme et maladies obstructives pulmonaires
Circonstances de survenue
- Voie d’administration (IV, orale)
EXAMEN CLINIQUE
Syndrome adrénergique
- Tachycardie
- HTA
- Sueurs
- Mydriase
- Tremblements, agitation , convulsions
Pulmonaire
- Tachypnée (noter la FR)
- Troubles respiratoires, hyperventilation voire dépression respiratoire
Neurologique
- Agitation
- Tremblements
- Convulsions
- Confusion mentale
Digestif
- Abdomen pseudochirurgical
EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES
ECG : Tachycardie sinusale ou tachyarythmies supraventriculaires
Signes paracliniques
BIOLOGIQUE
- Ionogramme sanguin
- hypokaliémie dont la sévérité est corrélée à la théophyllinémie
- acidose (par production d’acide lactique)
- Hypomagnésémie
- Hypophosphatémie
- Hypercalcémie (hyperadrénergisme) ou hypocalcémie
- Hyperglycémie
TOXICOLOGIQUES
- Théophyllinémie : toxique si > 20mg/L
IMAGERIE
Radio de thorax si dyspnée, recherchant une pneumopathie d’inhalation
TDM cérébral si convulsions
Diagnostic différentiel
- Fibrillation auriculaire
- Delirium tremens
- Infarctus du myocarde
- Sevrage en benzodiazépines
- Crise hypertensive
- Etat de mal épileptique
- Accident vasculaire cérébral
- Syndrome viral
Traitement
TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE
Voie d’abord veineuse de gros calibre avec NaCl 0,9% > 1,5-2 L/24h + vitamine B1
Remplissage si collapsus
Antiémétiques
- Préférer le métoclopramide pour son action anti 5HT3
- Les dérivés phénothiazidiques doivent être évités car ils abaisseraient le seuil convulsif
Anticonvulsivants
- Le diazépam est la drogue de première intention. Son efficacité est très inconstante dans cette indication.
- La carbamazépine ou le phénobarbital peuvent être utilisés.
- La phénytoïne doit être évitée.
DECONTAMINATION DIGESTIVE
Charbon activé
- Dans les 2 heures suivant l’ingestion en l’absence de contre-indications
- Administration de doses répétées de charbon pour augmenter la clairance (efficacité équivalente à l’épuration extracorporelle)
CORRECTION OU PREVENTION DES ARYTHMIES VENTRICULAIRES
Les ß-bloquants
- Ils préviennent aussi l’hyperglycémie, l’hypokaliémie, l’acidose et l’hypophosphorémie
- A utiliser avec prudence car risque majeur de bronchospasme
- La drogue de référence est le propranolol (Avlocardyl): 1-3 mg en IVL (0,02 mg/kg chez l’enfant) et répétée toutes les 5-10 min. Le maximum est de 0,1 mg/kg
- L’esmolol peut être utilisé (500 mg/kg pendant 1 min suivie de 50 µg/kg/min)
Autres anti-arythmiques
- L’adénosine (Striadyne) a été proposée pour réduire les tachycardies induites par la théophylline, celle-ci étant un antagoniste de l’adénosine.
- Il en faudrait des doses élevées (> 30 mg)
- Risque majeur de bronchospasme chez les asthmatiques
EPURATION EXTRACORPORELLE
- La théophylline est dialysable car petit poids moléculaire et petit volume de distribution (0,4-0,6 L/kg).
- Une séance de 6-8 heures de dialyse suffit généralement.
- L’hémoperfusion sur colonne de charbon est la technique la plus employée. Elle augmente la clairance de 4-6 fois. Une séance de 4 heures diminue de trois quart la quantité totale de théophylline dans l’organisme.
- Indications :
- persistance d’un état clinique grave (état de mal convulsif réfractaire ou hémodynamique instable) en présence de concentrations massives de théophylline dans le sang (par exemple : > 100 mg/L en cas d’intoxication aiguë, > 60 mg/L pour une intoxication chronique, > 30 mg/L pour les enfants < 6 mois ou sujets âgés > 60 ans)
Surveillance
CLINIQUE
- Scope (ECG au moindre doute)
- SpO2
- PA, FC, FR / h
BIOLOGIQUE
- Ionogramme sanguin (kaliémie, RA), lactates, glycémie
Devenir / orientation
EN PREHOSPITALIER
- Transport aux urgences pour surveillance si aucun signe de gravité clinique
- Transport en réanimation dans les autres cas
EN INTRAHOSPITALIER
Critères d’admission en réanimation
- Troubles de la conscience, convulsions, état de mal convulsif
- Collapsus ou HoTA, hypovolémie
- Troubles du rythme graves
Mécanisme / description
- La dose toxique est > 3 g pour l’adulte et > 15 mg/kg pour l’enfant
- Le taux thérapeutique de théophylline est de 55-111 mmol (10-20 mg/L)
- La toxicité est directement corrélée à la concentration sérique
- Pharmacocinétique :
- bonne absorption par voie orale, pic à 30 min, jusqu’a 24 h en doses toxiques.
- métabolisme essentiellement hépatique (90%), par le cytochrome P450 en acide 1,3-diméthyl-urique, 1-méthyl-urique et en 3-méthylxanthine, éliminés dans les urines.
- une fraction est transformée en caféine
- le métabolisme hépatique est saturable.
- demi-vie d’élimination de l’ordre de 6-8 heures.
- Pharmacodynamie :
- myorelaxant du muscle lisse par augmentation de l’AMPc suite à l’inhibition de la phosphodiéstérase
- antagoniste de l’adénosine, un analeptique respiratoire et un psychostimulant
- faible action diurétique et stimulante cardiaque
- induction d’un état d’hyperadrénergie métabolique (hypokaliémie, hyperglycémie, acidose lactique, hypophosphorémie) et vasculaire (collapsus et trouble du rythme).
Bibliographie
- Bauer P. Intoxication par la théophylline In Danel V. and Barriot P. Les Intoxications Aiguës eds ARNETTE, Paris, 1993, 471-478.
- Minton N.A, Henry J.A. Treatment of theophylline overdose. Am J Emerg Med 1996; 14:606-612.
- Tirot P, Harry P, Bouachour G, Alquier P. Epuration extrarénale en toxicologie. Réan Urg 1993; 2:27-37.
- Charytan D, Jansen K. Severe metabolic complications from theophylline intoxication. Nephrology 2003;8(5):239-242.
Auteur(s) : Dabor RESIERE
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