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Intoxication : aspirine et salicylés

Spécialité : toxicologie /

Points importants

  • Intoxication peu fréquente, mais potentiellement grave en particulier chez l’enfant et la personne âgée
  • Tableau complet très riche sur le plan sémiologique, avec présence constante à la phase initiale d’une hyperventilation et de signes neurosensoriels très évocateurs
  • Intoxication grave dans les circonstances suivantes :
    • dose massive
    • retard de prise en charge
    • nourrisson, jeune enfant, personne âgée, femme enceinte
    • pathologies rénale ou hépatique préexistantes
  • Signes cliniques d’apparition retardée avec les formes retard à enrobage gastro-résistant
  • Dose toxique théorique chez l’adulte : 10 à 15 g en prise unique
  • Dose toxique théorique chez l’enfant : 100 à 150 mg/kg en prise unique
  • L’intoxication peut survenir avec d’autres salicylés que l’aspirine, en particulier l’huile essentielle de Gaulthérie couchée ou les pommades à base de salicylée utilisée entre autres pour le traitement des verrues en cas d’application étendue ou d’ingestion

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

Troubles neurosensoriels

  • Céphalées
  • Bourdonnements d’oreilles
  • Acouphènes
  • Vertiges
  • Somnolence
  • Agitation
  • Hallucinations
  • Coma
  • Convulsions

Troubles digestifs

  • Epigastralgies
  • Nausées, vomissements
  • Rarement hémorragies et perforations digestives

Troubles respiratoires

  • Hyperventilation, très évocatrice, par stimulation des centres bulbaires entraînant une alcalose respiratoire, et dans les cas graves, dépression respiratoire par épuisement musculaire et énergétique

Troubles rénaux

  • Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle

Hyperthermie

  • Due au découplage de la phosphorylation oxydative, accompagnée d’hypersudation, de vasodilatation et de déshydratation

CONTEXTE

Terrain

  • Intoxication volontaire aiguë
  • Surdosage possible du fait de la cinétique d’élimination d’ordre 0 de la molécule : sujet âgé, nourrissons
  • Gravité particulière :
    • nourrisson
    • sujet âgé
    • femme enceinte

Antécédents

  • Aucun antécédent particulier. Attention à la grossesse

Circonstances de survenue

  • Intoxication volontaire aiguë
  • Surdosage possible par application cutanée chez le nouveau-né, le nourrisson
  • Le patient a-t-il pris d’autres toxiques ?
  • Pas de synergie particulière. Intoxication souvent monomédicamenteuse

EXAMEN CLINIQUE

  • Troubles cardiovasculaires :
    • tachycardie, et en cas de prise importante
    • choc vasoplégique d’origine centrale
  • Recherche de signe d’épuisement respiratoire
  • Recherche de signes de déshydratation
  • Auscultation pulmonaire à la recherche d’un oedème pulmonaire
  • Recherche de signes d’HTIC liés à un oedème cérébral
  • Des pétéchies et des hémorragies conjonctivales sans conséquence peuvent apparaître (liés à des troubles des fonctions plaquettaires)

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

  • Hypoglycémie fréquente chez l’enfant
  • SpOà la recherche d’une désaturation montrant un épuisement respiratoire
  • ECG à la recherche de signe d’hypokaliémie

CIMU

  • Tri : 1 à 5 selon la quantité de médicaments pris

Signes paracliniques

BIOLOGIQUE

  • Ionogramme sanguin et NFS :
    • recherche de signes de déshydratation, d’une hypokaliémie favorisée par l’alcalose
  • Lactates sanguins et gaz du sang artériels :
    • troubles acido-basiques : alcalose respiratoire initiale compensée par une perte de bicarbonates urinaires, puis une acidose métabolique avec hyperlactatémie, cétonurie (l’acidose métabolique est signe de mauvais pronostic)
  • Anomalies de l’hémostase : hypoprothrombinémie, hypofibrinémie
  • Salicylémie

Diagnostic étiologique

  • Anamnèse. Analyse toxicologique. Salicylémie
  • La gravité de l’intoxication n’est pas strictement corrélée à la salicylémie. Elle sera jugée sur les signes cliniques, les troubles acido-basiques et la salicylémie
  • Les premiers symptômes apparaissent pour des salicylémies de l’ordre de 250 mg/L ; l’intoxication est grave autour de 500 mg/L et une épuration extra-rénale par hémodialyse est envisagée au-delà de 900 mg/L
  • Dose toxique théorique chez l’adulte : 10 à 15 g en prise unique
  • Dose toxique théorique chez l’enfant : 100 à 150 mg/kg en prise unique
  • L’interprétation de la salicylémie doit tenir compte de l’état d’hydratation du sujet, de l’absorption éventuelle de formes retard, d’un possible retard de la vidange gastrique

Diagnostic différentiel

  • D’une déshydratation, de troubles acido-basiques, d’une hyperthermie. Peu de problèmes en pratique compte tenu de l’anamnèse et des résultats de l’analyse toxicologique
  • Evoquer cette intoxication en présence d’un trouble acido-basique inexpliqué lors d’une intoxication polymédicamenteuse ou d’une acidocétose inexpliquée chez un patient non diabétique
  • Diagnostic à évoquer devant une hyperventilation non expliquée chez un sujet conscient

Traitement

TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER

Stabilisation initiale

  • L’hospitalisation doit être systématique pour surveillance évolutive des premières heures, mais une prise en charge médicalisée ne s’impose en préhospitalier que dans les formes graves (troubles de conscience, détresse respiratoire, déshydratation aiguë)
  • Réhydratation intraveineuse, assistance respiratoire si besoin
  • Pas de sédation en l’absence d’assistance respiratoire (risque d’épuisement respiratoire)
  • Le traitement symptomatique est essentiel comportant :
    • une réhydratation orale ou IV
    • l’apport éventuel de glucose, de vitamine K
    • correction de l’acidose métabolique par l’administration titrée IV de bicarbonate de sodium à 8,4% 50mL par 50 mL jusqu’à obtenir un pH = 7,4
    • alcalinisation des urines si concentration de salicylés entre 600 et 800 mg/L chez l’adulte et 450 à 700 mg/L chez l’enfant et la personne âgée. Administrer 1L de bicarbonate de sodium à 1,4% par voie IV sur 2h. Objectif pH entre 7,5 et 8,5 à la BU
    • le traitement épurateur : la diurèse alcaline augmente l’élimination rénale des salicylés :
      • il faut obtenir un pH urinaire > 7,5 par perfusion IV de solutés alcalins
      • l’épuration extrarénale (hémodialyse) est indiquée en cas d’intoxication grave avec salicylémie > à 900 mg/L, en cas d’acidose sévère ou dans les formes compliquées (insuffisance rénale, OAP)
  • Le traitement évacuateur digestif par lavage gastrique ou charbon activé, à discuter au cas par cas (appel à un CAP), n’a pas d’intérêt démontré

Suivi du traitement

  • La diurèse alcaline est efficace
  • L’hémodialyse est réservée aux formes graves
  • Suivi psychologique/psychiatrique si besoin

MEDICAMENTS

  • Bicarbonate de sodium à 1,4% et 8,4%
  • Charbon activé

Surveillance

CLINIQUE

  • FC, PA, SpO2, diurèse/h
  • Température/4h

PARACLINIQUE

  • BU (pour l’alcalinisation des urines)
  • Gaz du sang
  • Ionogramme sanguin, glycémie, lactates

Devenir / orientation

EN PREHOSPITALIER

  • Prise en charge symptomatique
  • Médicalisation dans les formes graves uniquement (signes d’épuisement respiratoire, déshydratation majeure). Admission dans une structure d’urgence ou de réanimation

EN INTRAHOSPITALIER

  • Prise en charge dans une structure d’urgence pour les formes modérées :
    • surveillance systématique pendant 24 h (UHCD)
  • Admission en réanimation pour les formes graves (intensité de la déshydratation, troubles acido-basiques, épuisement respiratoire, salicylémie élevée)

Mécanisme / description

  • L’aspirine a des propriétés anti-inflammatoires, antalgiques, antipyrétiques
  • Elle exerce sa toxicité par deux mécanismes : inhibition de la synthèse des prostaglandines et effet toxique cellulaire direct
  • Toxicocinétique :
    • absorption :
      • acide faible rapidement hydrolysé dans le tube digestif en 30 min. à dose thérapeutique
      • l’absorption est ralentie par la présence d’aliments, d’adsorbants ou dans les formes retard : il peut se former des conglomérats dans l’estomac
      • l’absorption est possible par voie cutanée ou rectale
      • le pic plasmatique intervient entre la 2e et 4e h voire plus tard en cas de formes gastrorésistantes (ou de conglomérats)
      • la liaison protéique est de l’ordre de 80 à 90%
    • élimination :
      • 95% de la quantité ingérée est conjuguée au niveau hépatique à la glycine et à l’acide glucuronique avec formation de composés inactifs, éliminés par voie rénale
      • lors d’un surdosage, les systèmes de conjugaison sont saturés
      • l’élimination rénale de l’acide salicylique devient prépondérante avec filtration glomérulaire, réabsorption tubulaire puis sécrétion tubulaire active
      • la demi-vie d’élimination est de 2 à 4 h à dose thérapeutique, jusqu’à 40 h en cas de surdosage
      • l’alcalinisation urinaire, augmentant la fraction ionisée, diminue la réabsorption et favorise ainsi l’élimination

Bibliographie

  • Proudfoot AT, Krenzelok EP, Vale JA. Position Paper on urine alkalinization. J Toxicol Clin Toxicol 2004; 42: 1-26
  • Dargan PI, Wallace CI, Jones AL. An evidence based flowchart to guide the management of acute salicylate (aspirin) overdose. Emerg Med J. 2002; 19(3): 206-9
     

Auteur(s) : Vincent DANEL

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