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Mal aigu des montagnes

Spécialité : pathologies circonstancielles / pédiatrie /

Points importants

  • Le mal aigu des montagnes fait partie des pathologies de l’altitude dans lesquelles on retrouve :
    • des accidents thromboemboliques
    • des accidents neurologiques
    • une polyglobulie chronique
    • des oedèmes localisés
  • Les principaux mécanismes physiopathologiques de ce syndrome sont :
    • une rétention hydrosodée
    • un trouble de la perméabilité vasculaire
    • une augmentation du débit sanguin cérébral
    • une hypertension artérielle pulmonaire
  • La clinique et la paraclinique sont pauvres dans le mal aigu des montagnes non compliqué
  • Il peut se compliquer d’oedème cérébral ou pulmonaire
  • Les céphalées et les signes digestifs apparaissent en général au-dessus de 2 500 mètres lorsque l’acclimatation est insuffisante
  • La gravité est estimée par le score de Hackett
  • Les tests d’effort en milieu hypoxique peuvent déceler les sujets à risque
  • Le traitement préventif à l’acétazolamide est à retenir chez les sujets à risques
  • La redescente, le caisson de recompression, l’oxygénothérapie et les corticoïdes sont les agents principaux du traitement curatif
     

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

Ces signes peuvent passer inaperçus car souvent mis sur le compte d’autres problèmes : « méforme », gastro-entérite, angoisse de la course du lendemain

Signes généraux

  • Fatigue inhabituelle à l’effort
  • Asthénie au repos
  • Manque d’appétit, anorexie

Neurologiques

  • Céphalées intenses généralisées pouvant varier dans la journée
  • Une insomnie
  • Sensations vertigineuses
  • Ataxie dans les formes graves

Respiratoires

  • Dyspnée dans les formes graves

Digestifs

  • Nausées
  • Vomissements

Néphro-urinaires

  • Baisse de la diurèse

Score de gravité

  • Score de Hackett

CONTEXTE

ATCD et terrain à risque

  • Le MAM concerne le plus souvent les sujets jeunes
  • Maladies s’accompagnant d’un risque accru de MAM :
    • patients migraineux
    • patients obèses, notamment en cas d’hypoxies nocturnes (Syndrome d’apnée du sommeil, Syndrome obésité – hypoventilation, Syndrome de Pickwick…)
  • Facteurs non discriminants :
    • le sexe : Sexe ratio = 1
    • la forme physique, le niveau de la VO2 Max ne sont pas des facteurs protecteurs

Circonstances de survenue

  • L’hypoxémie stimule les chémorécepteurs carotidiens. Certains sujets ont une réponse insuffisante et peuvent développer plus facilement un MAM
  • Manque d’acclimatation : période trop courte entre la date d’arrivée à l’altitude du lieu de départ et la date de début de l’effort
  • L’altitude : le MAM survient en général au-dessus de 2 500 mètres d’altitude, rarement en dessous, après un délai de 4 h à 8 heures
  • La vitesse d’ascension (montée en altitude) : au-dessus de ce seuil de 2 500 mètres d’altitude, une vitesse d’ascension supérieure à 400 mètres par jour favorise l’apparition d’un MAM
  • L’intensité de l’effort est un facteur favorisant
  • La nuit est une période plus délicate avec des hypoxies importantes à la suite d’une réponse ventilatoire diminuée ou d’apnées du sommeil

EXAMEN CLINIQUE

MAM léger à modéré

  • L’examen clinique reste normal dans les stades légers à modéré de MAM

Formes compliquées

  • Œdème pulmonaire de haute altitude (OPHA) :
    • complication respiratoire des MAM, on retrouve à l’examen les signes respiratoires semblables à un OAP cardiogénique :
      • toux
      • expectorations mousseuses
      • râles crépitants
      • cyanose
      • dans les formes sévères, tableau de détresse respiratoire
  • Œdème cérébral de haute altitude (OCHA) :
    • complication pouvant être associée à l’OPHA, il est la conséquence d’une rétention hydrique dans le volume inextensible que constitue la boîte crânienne
    • il présente, selon son importance, des signes neurologiques de gravité croissante évoluant vers un tableau d’HTIC :
      • céphalée intense
      • désorientation
      • ataxie
      • troubles visuels
      • confusion mentale avec agitation, hallucinations
      • convulsions
      • troubles de la conscience pouvant aller de la simple obnubilation au coma
  • Cas particulier : on peut trouver préférentiellement chez les femmes un oedème de la face, des paupières et des membres supérieurs et inférieurs, témoin de la rétention hydrique

CIMU

  • Tri 1 à 4 selon niveau de gravité

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

  • L’ECG n’est pas contributif mais doit être réalisé, à la recherche de signes de complications myocardiques secondaires à l’hypoxie, notamment chez des patients coronariens
  • Hypoxie au saturomètre de pouls
     

Signes paracliniques

  • Dans la phase de MAM non compliquée, aucun examen paraclinique n’est contributif
  • On retrouve habituellement une hypoxie à l’examen gazométrique artériel, plus marquée chez les patients porteurs de signes cliniques d’OPHA

BIOLOGIQUE

Nécessaire dans les formes modérées à sévères. Il n’est réalisable que si le patient doit être hospitalisé et comportant notamment

  • NFS : l’absence de polyglobulie ou d’élévation de l’hématocrite est un signe de manque d’acclimatation
  • Ionogramme sanguin à la recherche de troubles hydro-électrolytiques (notamment dysnatrémie)
  • Bilan d’hémostase standard : TP, TCA, plaquettes
  • Dans les formes sévères avec troubles de conscience, OPHA, ajouter :
    • bilan enzymatique cardiaque (troponine Ic, myoglobine, CPK), à la recherche d’une souffrance myocardique hypoxémique
    • lactacidémie, témoin indirect de la gravité de l’hypoxie tissulaire
    • bilan hépatique et rénal

IMAGERIE

  • Bilan radiographique et autres examens :
    • devant un tableau d’OPHA, la radiographie du thorax de face montre une surcharge pulmonaire et des opacités alvéolaires inhomogènes
    • devant un tableau d’OCHA :
      • scanner cérébral à la recherche d’un oedème cérébral et de complications intracrâniennes
      • fond d’oeil à la recherche d’un oedème papillaire et surtout d’hémorragies rétiniennes, complication ophtalmique classique du MAM
         

Diagnostic étiologique

  • Il semble évident dans un contexte de séjour en haute altitude et surtout lors d’une ascension rapide
  • Mais il est parfois méconnu, notamment :
    • lorsqu’il se produit à des altitudes modérées (< 2 500 m)
    • lorsqu’il se déclenche chez un alpiniste entraîné qui a déjà connu des altitudes identiques sans problème
  • Dans ce contexte c’est l’altitude qu’il faut retenir en premier comme étiologie
     

Diagnostic différentiel

Des céphalées et signes neurologiques

  • Peuvent être évoquées toutes les orientations diagnostiques d’une céphalée aiguë accompagnée de symptômes neurologiques :
    • hémorragie méningée
    • AVC
    • thrombose veineuse cérébrale
    • méningite…

De la dyspnée et du tableau d’OAP

  • OAP cardiogénique : infarctus du myocarde en rapport avec l’hypoxémie d’altitude, crise aiguë hypertensive…
  • Pneumopathie
  • Asthme
  • Embolie pulmonaire
  • OAP lésionnel d’origine toxique (consommation de drogues…)

Du syndrome digestif (nausées, vomissements…)

  • Gastro-entérite aiguë
  • Intoxication alimentaire
  • Occlusion intestinale
  • Appendicite…
     

Traitement

MAL AIGU DES MONTAGNES

Formes de gravité légère à modérée (

Score de Hackett < 7)

  • Traitement per os : adulte :
    • aspirine 1g
    • paracétamol 1g (renouvelable toutes les 8h)
  • Suite du traitement :
    • si les céphalées et autres signes fonctionnels cèdent, la progression en altitude peut reprendre, avec une intensité et une rapidité d’ascension modérées
    • si les douleurs persistent, le repos s’impose à la même altitude jusqu’à amélioration
    • la durée de ce traitement ne doit pas excéder 3 ou 4 jours. Sans amélioration, redescente

Formes sévères (

Score de Hackett = 7)

  • La redescente s’impose :
    • sur au moins 400 à 500 mètres de dénivelé, jusqu’à amélioration des signes
    • cette stratégie est difficile à appliquer à un groupe qui va devoir se séparer parfois pour la totalité de l’ascension ou du trek
  • Les corticoïdes :
    • peuvent être utilisés dans les MAM sévères
    • administration par perfusion : méthylprednisolone 40 mg dans 100mL de NaCl 0,9%, à passer en IVL (en 20 min) au rythme de 3 administrations par 24 h
    • respecter les contre-indications
    • le but est d’autonomiser l’alpiniste pour la redescente
  • Caisson de recompression portable en toile (4,5 kg) :
    • permet de placer le patient dans une enceinte en surpression de 220 mbar
    • l’objectif est d’obtenir une augmentation de la pression partielle d’oxygène et de créer artificiellement l’équivalent d’une perte d’altitude de 2 000 à 3 000 m environ, en fonction de l’altitude où l’on se trouve (ex : à 4 500 m, le patient est à l’équivalent de 2 000 m à l’intérieur du caisson)
    • séances de 1 heure renouvelables durant lesquelles les accompagnants doivent renouveler l’air en permanence à l’aide d’une pompe (10 mouvements/min)
    • le but est d’autonomiser le patient pour le faire redescendre
    • penser à donner un sac pour contenir les vomissements du patient…
  • A éviter absolument :
    • les somnifères
    • les diurétiques de l’anse (type furosémide)
    • les inhibiteurs calciques
    • l’alcool…

ŒDEME PULMONAIRE DE HAUTE ALTITUDE (OPHA)

  • La redescente est obligatoire +++. Choisir le vecteur d’évacuation le plus approprié (traineau avec motoneige, évacuation héliportée…) en fonction de l’accès et des conditions météorologiques
  • Oxygénation :
    • à débuter dès que possible
    • oxygénation au masque, éventuellement avec réservoir, avec débit suffisant pour obtenir une SpO2 > 95%
    • attention : adapter la posologie à la durée d’évacuation et aux réserves disponibles
    • l’intubation et la ventilation sont indiquées si des troubles de la conscience apparaissent (GCS < 8). Celle-ci est parfois impossible dans des lieux très isolés
  • Séances de caisson portable : penser à positionner le caisson avec la tête haute
  • Médicaments :
    • corticoïdes tels que dans le MAM avec forme sévère
    • dans les formes critiques, le furosémide (20 à 40 mg IV renouvelable une fois sur 24 heures), mais ce traitement difficile à gérer en milieu isolé
    • les inhibiteurs calciques diminuent l’hypertension artérielle pulmonaire mais sont très difficiles à utiliser par leurs effets hypotenseurs

ŒDEME CEREBRAL DE HAUTE ALTITUDE (OCHA)

  • C’est une urgence absolue avec une mortalité élevée
  • Tant que la personne est consciente, il faut rendre la descente obligatoire par tous les moyens
  • Traitement d’urgence :
    • positionner le patient tête haute (réduction de l’oedème cérébral)
    • oxygénothérapie en ventilation spontanée ou intubation pour ventilation assistée, selon le niveau de gravité, l’état de conscience et les moyens d’évacuation
    • séances de caisson portable
    • corticoïdes précoces et à forte dose : méthylprednisolone 120 mg dans 100 mL de NaCl à 0,9% en perfusion intraveineuse sur 20 min
    • mannitol : on dispose actuellement de peu d’éléments pour en indiquer l’utilisation dans ce contexte
       

Surveillance

CLINIQUE

  • Conscience, PA, FC, FR, SpO2, auscultation pulmonaire
     

Devenir / orientation

EN PREHOSPITALIER

Formes de gravité légère à modérée (

Score de Hackett < 7)

  • En cas d’amélioration et stabilisation avec le traitement sur place (corticoïdes, caisson portable), la poursuite de l’effort est envisageable avec des consignes strictes de réduire l’intensité des efforts
  • En absence d’amélioration et à plus forte raison en cas d’aggravation, une hospitalisation s’impose et l’orientation doit être organisée vers un centre ayant une bonne maîtrise de cette pathologie et d’un plateau technique adapté

Formes de gravité sévère (

Score de Hackett = 7)

  • Prise en charge préhospitalière médicalisée spécialisée
  • Transport si possible d’emblée vers un centre disposant des compétences et plateaux techniques adaptés : réanimation

RECOMMANDATIONS

La survenue de cette pathologie expose aux récidives lors de retour en altitude ; si un oedème cérébral ou pulmonaire survient au cours d’une expédition il faut conseiller une redescente sans remontée secondaire après amélioration

Test de réponse à l’hypoxie

  • Notamment lorsqu’il s’agit d’une première course en haute montagne, il est recommandé d’effectuer au préalable un test de réponse à l’hypoxie avant de partir
  • Ce test est proposé à l’ENSA (Ecole Nationale de Ski et d’Alpinisme) à Chamonix, également dans les services d’explorations fonctionnelles à Paris, Toulouse, Grenoble…
  • Ce test dépiste les mauvais répondeurs à l’hypoxie et permet de leur proposer une stratégie d’acclimatation

Mesures préventives

  • Une bonne acclimatation nécessite du temps pour s’acclimater avant une course en altitude
  • Ne pas faire d’efforts importants durant cette phase d’acclimatation, rester toujours bien en deçà de ses capacités habituelles
  • En cours d’ascension, ne pas dépasser 400 mètres de dénivelé par jour au-delà de 3000 mètres
  • Si le campement est impossible et l’ascension dans la journée supérieure à ce dénivelé, il faut prévoir une journée de repos pour revenir dans la moyenne de 400 mètres par jour
  • Attention aux treks avec passages de plusieurs cols : si un montagnard déclenche une pathologie entre 2 cols avec comme seul échappatoire une montée, l’évacuation sera bien plus délicate

Traitement préventif

  • Aspirine :
    • permet la réduction des céphalées aux doses habituelles (500 mg, 1 g/ 24h)
    • ce traitement doit rester très ponctuel (2 à 3 jours) et respecter les contre-indications
  • Acétazolamide (Diamox) :
    • peut être donné en préventif chez les mauvais répondeurs à l’hypoxie, à la posologie de 125 mg matin et midi dès 3 000 mètres d’altitude, durant la phase d’acclimatation et la période d’escalade avec dénivelés importants
    • outre son effet diurétique, l’acétazolamide favorise l’élimination urinaire des bicarbonates et diminue l’alcalose induite par la polypnée en altitude
    • respecter les contre-indications
       

Mécanisme / description

Le MAM serait provoqué par un oedème cérébral modéré dû à

  • Une rétention hydrosodée liée essentiellement à une augmentation de la sécrétion d’hormone antidiurétique (ADH) et par une augmentation de l’action de l’aldostérone
  • Une augmentation du débit sanguin cérébral moins bien régulé
  • Des troubles de la perméabilité vasculaire provoqués directement par l’hypoxie ou indirectement par des médiateurs chimiques libérés par l’endothélium hypoxique : thromboxane, leucotriènes…

L’OPHA serait provoqué par

  • Une hypertension artérielle pulmonaire due à une vasoconstriction pulmonaire
  • Des lésions de l’épithélium et de l’endothélium alvéolo-capillaire inhomogènes, à la fois hypoxique et dépendant des médiateurs de l’inflammation (leucotriènes, endothéline…)
  • La rétention hydrosodée décrite précédemment

L’OCHA serait dû aux mêmes mécanismes que le MAM avec une note cytotoxique cérébrale plus marquée
 

Bibliographie

  • HACKETT, ROACH. High altitude illness. N England J Med. 2001;345 :107-14
  • RICHALET, HERRY. Médecine de l’alpinisme et des sports de montagne. Masson, Paris, 2006 (4e édition)

Auteur(s) : Franck MENGELLE

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