Spécialité : toxicologie /
Points importants
- Les IMAO sont des antidépresseurs de seconde intention
- La gravité de l’intoxication par iproniazide, IMAO de première génération, est surtout le fait des associations médicamenteuses, surtout si les médicaments associés font partie de la longue liste des interactions médicamenteuses, avec un risque particulier de survenue d’un syndrome sérotoninergique sévère
- Le tableau habituel d’une intoxication isolée par iproniazide (Marsilid) est une intoxication modérée d’évolution favorable
- L’intoxication aiguë par la moclobémide (Moclamine), IMAO sélectif de seconde génération, est bénigne si elle est isolée. Par contre, l’association à un imipraminique est responsable d’intoxication grave, parfois syndrome sérotoninergique, même si les quantités sont faibles
Présentation clinique / CIMU
SIGNES FONCTIONNELS
Iproniazide (Marsilid)
- Les symptômes apparaissent dans les 6 à 12 h suivant l’ingestion
- Une intoxication à des doses = 1,5 g peut engager le pronostic vital avec une mortalité estimée à 30%
- Les intoxications bénignes s’accompagnent de céphalées, d’agitation et d’hallucinations
- Les formes graves comportent un coma profond hypo- ou hypertonique souvent prolongé, des convulsions et une hyperthermie
- Le tableau clinique est habituellement plus sévère lors d’associations médicamenteuses :
- antidépresseurs tricycliques et/ou carbamazépine : risque d’hyper- ou d’hypotension artérielle, d’agitation et d’hyperthermie
- ISRS : syndrome sérotoninergique
- neuroleptiques : majoration du syndrome anticholinergique et extrapyramidal
- sympathomimétiques a et b : hypertension sévère se compliquant d’oedème cérébral et pulmonaire et d’hémorragies méningées
- hypotenseurs (antihypertenseurs centraux, hydralazines, diurétiques, alpha-1-bloquants, bêtabloqueurs) : risque de collapsus réfractaire
- alcool, autres psychotropes et stupéfiants : majoration des convulsions, de l’hyperthermie et de la dépression respiratoire
- aliments contenant de la tyramine (bananes, fromages fermentés, choux, pomme de terre, harengs, charcuteries, vins…) : potentialisation des effets hypertensifs des IMAO
Moclobémide (Moclamine)
- La toxicité du moclobémide ingéré seul est limitée :
- nausées
- somnolence
- désorientation
- agitation
- amnésie
- fièvre
- Néanmoins, au cours d’intoxications massives (= 6 g) ont été décrites des convulsions et une rigidité musculaire superposable au syndrome malin des neuroleptiques :
- la symptomatologie est corrélée à la dose ingérée
- les intoxications graves sont surtout dues aux associations médicamenteuses prosérotoninergiques synergiques
CONTEXTE
Terrain
- Patient traité pour dépression
- Polymédication possible
Antécédents
- Une polyintoxication est un facteur aggravant, en particulier avec l’iproniazide (cf. clinique)
Circonstances de survenue
- Intoxication volontaire aiguë le plus souvent
Le patient a-t-il pris d’autres toxiques ?
- A vérifier systématiquement
- Particulière gravité des intoxications polymédicamenteuses
EXAMEN CLINIQUE
- Examen très complet sans orientation particulière
Iproniazide (Marsilid)
- Intoxication bénigne :
- mydriase
- sueurs
- tachycardie
- hypertonie avec syndrome pyramidal
- trismus
- hypotension orthostatique ou une HTA
- Forme grave :
- coma profond hypo- ou hypertonique souvent prolongé
- convulsions
- hyperthermie
- tachypnée
- hypo- ou HTA
Moclobémide (Moclamine)
- La toxicité du moclobémide ingéré seul est limitée :
- hyporéflexie ostéotendineuse
- désorientation
- agitation
- amnésie
- mydriase
- fièvre
- hypo- ou hypertension modérée
- Néanmoins, au cours d’intoxications massives (= 6 g) ont été décrites des convulsions et une rigidité musculaire superposable au syndrome malin des neuroleptiques
EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES
- ECG : troubles de repolarisation lors d’intoxication grave à l’iproniazide (Marsilid)
CIMU
- Tri 2 et 3 rarement 4
Signes paracliniques
BIOLOGIQUE
- Pas de marqueur biologique spécifique
- Biologie de routine, avec une particulière attention à la fonction rénale et l’équilibre acido-basique
- Enzymologie hépatique, créatines kinases
- Gaz du sang artériel
- Des troubles de l’hémostase, une rhabdomyolyse avec hyperkaliémie et élévation des créatines kinases, une insuffisance rénale aiguë peuvent être observées dans les intoxications sévères par iproniazide
- Une hyperleucocytose, une thrombopénie, une élévation des transaminases, une acidose métabolique et une myoglobinurie ont été décrites avec le moclobémide, surtout en cas de syndrome sérotoninergique
IMAGERIE
- Si un coma est concomitant à la poussée hypertensive, un examen TDM cérébral doit être réalisé à la recherche de complications hémorragiques
Diagnostic étiologique
- Anamnèse et interrogatoire du patient, des proches, des témoins, du médecin traitant
- Analyse toxicologique non disponible en routine
Diagnostic différentiel
- Coma convulsif
- Hyperthermie
- Syndrome sérotoninergique
- Eliminer un problème infectieux, métabolique, neurologique
Traitement
STABILISATION INITIALE
Iproniazide
- En préhospitalier :
- sur place à domicile, décubitus strict du fait du risque d’hypotension orthostatique et traitement symptomatique
- hospitalisation par transport médicalisé (dose toxique dépassée, symptomatologie présente) selon l’état clinique
- intubation, ventilation assistée devant un coma, un collapsus
- une agitation, des convulsions, sont contrôlées par benzodiazépines
- A l’hôpital :
- poursuite du traitement symptomatique
- pas d’antidote spécifique
- la décontamination digestive par charbon activé est indiquée pour les intoxications vues dans l’heure qui suit l’ingestion, en dehors de toute contre-indication
- prudente utilisation de drogues adrénergiques en raison d’un risque de poussée hypertensive. Il est préférable de contrôler l’hypertension avec retentissement viscéral, par nitroprussiate de sodium, la place des bêtabloqueurs restant aléatoire
- l’apparition d’un syndrome sérotoninergique nécessite la correction de la déshydratation et une sédation par benzodiazépines
- l’hyperthermie maligne peut nécessiter en plus du refroidissement externe et des antipyrétiques, la prescription par la sonde gastrique de cyproheptadine (Périactine) :
- le dantrolène n’est pas efficace
- si une curarisation est nécessaire pour mieux adapter la ventilation ou lutter contre la rigidité musculaire, il faut éviter les agents dépolarisants comme le chlorure de suxaméthonium : Célocurine
- l’épuration rénale ou extrarénale n’ont aucun intérêt
Moclobémide
- Traitement symptomatique
- Pas d’antidote spécifique
- L’intérêt clinique du charbon activé n’a pas été formellement démontré
- Contrôle des convulsions par benzodiazépines
- Syndrome sérotoninergique (cf. ci-dessus)
MEDICAMENTS
- Charbon activé (1-2 g/kg jusqu’à 90 g dans 250 mL d’eau)
- Diazépam 5-10 mg IV lente renouvelable toutes les 5 min
- Clonazépam (Rivotril) 1 mg IVD à renouveler si besoin
- Midazolam (Hypnovel) :
- en titration : 1 mg IVD toutes les 5 min pour la sédation
- 2,5 à 5 mg en IVD pour induction anesthésique
- Cyproheptadine (Périactine 4mg) :
- adulte : 1 à 5 cp en 3 prises/j
- enfant > 6 ans : 1 à 3 cps en 2 à 3 prises/j
- effets secondaires :
- sédation ou somnolence
- effet anticholinergique
- hypotension orthostatique
- vertige et tremblement
- Nitroprussiate de sodium (Nitriate) : en l’absence d’autre antihypertenseur, posologie initiale de 0,5 µg/kg/min à augmenter progressivement jusqu’à l’effet hémodynamique souhaité. Dose moyenne de 3 µg/kg/min avec de larges variations individuelles (0,5 à 8 µg/kg/min) :
- objectif baissé la PA de 25% en 1h
Surveillance
- Conscience, T°, FR, PA, FC
Devenir / orientation
EN PREHOSPITALIER
- Hospitalisation systématique
- Médicalisation en présence de signes de gravité immédiate
EN INTRAHOSPITALIER
- Hospitalisation et surveillance 48 h dans une structure d’urgence
- Admission des formes graves dans un service de réanimation
Mécanisme / description
- Utilisés comme antidépresseurs de deuxième intention, les IMAO augmentent la concentration synaptique des catécholamines (dopamine, noradrénaline) et de la sérotonine en inhibant l’enzyme impliquée dans le catabolisme de ces substances : la monoamine oxydase ou MAO
- Les effets des IMAO de première génération (iproniazide : Marsilid) impliquent les MAO A et B (inhibiteurs mixtes). L’inhibition des neurotransmetteurs est irréversible : il faut un temps de latence pour que de nouvelles molécules de MAO A ou B soient synthétisées
- Les IMAO de deuxième génération (moclobémide : Moclamine) ont une action réversible et inhibent sélectivement la MAO A
Bibliographie
- White N, Litovitz T, Clancy C. Suicidal antidepressant overdoses: a comparative analysis by antidepressant type. J Med Toxicol. 2008; 4(4): 238-50
- Boyer EW, Shannon M. The serotonin syndrome. N Engl J Med. 2005; 352(11): 1112-20
Auteur(s) : Vincent DANEL
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