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Sepsis grave

Spécialité : infectieux / pédiatrie /

Points importants

  • Importance majeure du traitement très précoce (antibiothérapie, hémodynamique) dans le pronostic, tout comme l’infarctus myocardique ou l’AVC
  • Importance du recours rapide au réanimateur (pose de cathéter central pour mesure hémodynamique, administration de drogues cardioactives) soit d’emblée soit dès la première heure si non réponse au traitement initial
  • Définitions :
    • bactériémie : passage transitoire de bactéries viables dans la circulation sanguine (hémocultures positives)
    • SRIS (syndrome de réponse inflammatoire systémique) ou SIRS (systemic inflammatory response syndrome). Il est peu spécifique. Le SRIS n’est pas obligatoirement associé à une infection mais à une composante inflammatoire (hémorragie, traumatisme…). Il se définit par au moins 2 critères parmi les suivants :
      • T° > 38,3°C ou < 36°C
      • FC > 90 bpm
      • FR > 20/min ou PaCO2 < 32 mmHg
      • globules blancs > 12000 ou < 4000/mm3 ou > 10% de formes immatures
    • sepsis (infection systémique) : SRIS associé à une infection cliniquement ou biologiquement documentée
    • sepsis grave = sepsis associé à :
      • HoTA : PAS < 90 mmHg ou baisse > 40 mmHg par rapport à la PAS habituelle du patient
      • ou signes d’hypoperfusion (lactatémie > 4 mmol/L, oligurie)
      • ou de dysfonction d’organe (cerveau, rein, foie, coeur, poumons, hématologie)
    • choc septique : sepsis grave avec HoTA (PAS < 90 mmHg ou PAM < 65 mmHg) ou signes d'hypoperfusion résistante au remplissage ou à l'administration de drogues vasoactives
      • les sepsis graves représentent 15% des malades de réanimation dont 70% dès leur arrivée
      • 50% des sepsis graves viennent des services d’hospitalisation hors réanimation
      • 30% de mortalité à un mois

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

  • Recherche de troubles des fonctions supérieures, respiratoires

CONTEXTE

Terrain

  • A risque : VIH, éthylisme chronique, diabète, corticothérapie au long cours, neutropénie (néoplasie, asplénie), myélome

Traitement usuel

  • Immunosuppresseurs
  • Stéroïdes
  • Traitements renseignant sur le terrain

Antécédents

  • Connaître la PA habituelle du patient
  • Contact récent avec un milieu de soins
  • Manoeuvres invasives
  • Matériel étranger

Facteurs de gravité

  • Insuffisance cardiaque, hépatique ou rénale

EXAMEN CLINIQUE

Recherche d’une porte d’entrée

  • Pulmonaire : foyer systématisé à l’auscultation
  • Abdominal : nausées, vomissements, douleur abdominale spontanée ou provoquée, troubles du transit
  • Urinaire : signes de cystite
  • Inspection de la peau (purpura, lésions bulleuses ou nécrotiques, plaies), articulations (douleur, signes d’arthrite)
  • Corps étrangers (prothèses endovasculaires, articulaires)
  • Neurologique (signes de méningite)
  • Souffle cardiaque
  • Signes de thrombophlébite

Facteurs de gravité

  • Circulatoire :
    • PAS < 90 mmHg (ou baisse de 40 mmHg par rapport au chiffre de base) ou PAM < 65 mm Hg (ou PAD < 40 mmHg);
  • Respiratoire :
    • FR
  • Neurologique :
    • encéphalopathie ou syndrome confusionnel

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

  • SpO2 (gravité si < 90% à l’air)
  • ECG
  • Bandelette urinaire (aspect, leucocytes, nitrites)
  • Glycémie capillaire

CIMU

  • Tri 1 : si troubles de conscience, signes de choc (marbrures, cyanose, tension artérielle imprenable), détresse respiratoire
  • Tri 2 : fièvre avec signes de gravité clinique : T° > 39°C ou < 36°C, FR > 20/min, SpO2 < 90% à l’air ambiant, PAS < 90 mmHg, FC > 120 bpm

Signes paracliniques

BIOLOGIQUE

  • NFS (leucocytose), plaquettes
  • Ionogramme sanguin, urée, créatinine
  • Glycémie
  • CRP, PCT
  • TP, TCA, fibrinogène
  • Bilan hépatique complet
  • Ferritine, groupe sanguin, Rh, RAI
  • Prélèvements bactériologiques en fonction de la porte d’entrée suspectée (antigénurie pneumocoque et légionelle, ponction lombaire, ponction d’ascite, coproculture, …)
  • 2 Hémocultures espacées de 60 min d’intervalle avec demande d’examen direct par Gram
  • BU – ECBU
  • Gaz du sang (gravité si PaO2 < 60 mmHg)
  • Lactates (si signes de gravité)
  • Test dynamique à l’ACTH

AU TOTAL, SIGNES DE GRAVITE

Cliniques

  • Un malade adulte suspect d’infection et présentant au moins deux des symptômes suivants non expliqués par autre chose est à risque d’évolution rapide vers un sepsis grave :
    • température > 38,2 °C (ou hypothermie < 36 °C)
    • FR = 30 /min
    • FC > 120 /min
    • PAS < 110 mmHg
  • Ce d’autant que l’infection est d’origine :
    • pulmonaire,
    • ou intra-abdominale
    • ou lorsqu’il existe des signes directs d’infection grave (purpura, lésions nécrotico-bulleuses de fasciite nécrosante,..)

Biologiques

  • Thrombopénie < 150 000
  • Et/ou natrémie > 145 mmol/L
  • Et/ou bilirubinémie > 30 µmol/L

Mortalité immédiate

  • 3 signes : 15-20%
  • 4 signes : 20-30%
  • ≥ 5 signes : > 30%

NB : Un sepsis grave est un sepsis avec au moins une dysfonction d’organe autre que celle directement en rapport avec le foyer infectieux

IMAGERIE

  • Permet de rechercher le foyer infectieux et sera fonction de la symptomatologie clinique
  • Radio de thorax au lit
  • Echographie
  • Scanner

Diagnostic étiologique

  • 50% respiratoire
  • 25% intra-abdominal (péritonite, abcès)
  • 5% urinaire (rétention d’urines infectées), peau et tissus mous, intra-vasculaires

Diagnostic différentiel

  • Fièvre paranéoplasique
  • Fièvre dans le cadre d’une maladie thrombo-embolique
  • Fièvre d’origine toxique/iatrogène
  • Coup de chaleur
  • Paludisme et autres parasitoses

Traitement

TRAITEMENT PREHOSPITALIER / INTRAHOSPITALIER

Stabilisation initiale

  • Oxygénothérapie QSP SpO2 > 95%
  • Pose d’une voie veineuse et perfusion de NaCl 0,9%
  • Critères d’intubation :
    • dyspnée avec hypoxémie majeure malgré oxygénothérapie
    • troubles de conscience
  • Si HoTA (PAS < 90 mmHg ou PAM < 65 mmHg) :
    • objectif : PAM > 65 mmHg
    • expansion volémique : 500 mL de NaCl 0,9% en 15 min, renouvelable jusqu’à 60 mL/kg en 1 heure
    • prévenir le réanimateur si signes de gravité
    • administration de catécholamines associée au remplissage si PAS d’emblée < 70 mmHg et/ou PAD < 40 mmHg

Suivi du traitement

  • Catécholamines si persistance d’une PAM < 65 mmHg et/ou d’une diurèse < 0,5 mL/kg/h malgré remplissage
  • Contrôle du foyer infectieux :
    • antibiothérapie débutée par voie parentérale, à dose maximale d’emblée, au mieux dans l’heure sinon dans les 3 premières heures après prélèvements bactériologiques (débutée immédiatement en cas de liquide louche ou purulent à la PL)
    • ablation de cathéter
    • éradication chirurgicale
  • Traitement anti-pyrétique : Perfalgan 1 gr IV
  • Transfusion sanguine qsp hémoglobine 8-9 g/dL ou hématocrite > 30%
  • Sondage urinaire
  • Apport calorique polyvitaminique
  • Prophylaxie anti-ulcéreuse
  • Prophylaxie anti-thrombotique

MEDICAMENTS

(Bi-)Antibiothérapie probabiliste en fonction du site primitif d’infection

  • Méningite purulente :
    • cefotaxime 200 mg/kg/j ou ceftriaxone 100 mg/kg/j
    • alternative possible : discuter : vancomycine 50 mg/kg/j si risque de PSDP (pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline) amoxicilline 200 mg/kg/j si risque de listériose
  • Pneumonie :
    • pneumonie communautaire : cefotaxime 100 mg/kg/j ou ceftriaxone 50 mg/kg/j + macrolides ou lévofloxacine
    • pneumonie nosocomiale : pipérilline / tazobactam 4 g x 3/j + gentamycine 3 mg/kg/j sur 30 min + macrolides ou lévofloxacine
  • Pyélonéphrite :
    • cefotaxime 100 mg/kg/j ou ceftriaxone 50 mg/kg/j + gentamycine 3 mg/kg/j
  • Sepsis intra-abdominal :
    • amoxicilline/acide clavulanique 1 g x 3/j + gentamycine 3 mg/kg/j
    • alternative possible : ticarcilline/acide clavulanique 5 g x 3/j + gentamycine 3 mg/kg/j
  • Cellulite :
    • amoxicilline/acide clavulanique 2 g x3/j + gentamycine 3mg/kg/j
    • alternative possible : C3G (cefotaxime/ceftriaxone) + imidazolés
  • Endocardite bactérienne valve native :
    • oxacilline 2 gx6/j + gentamycine 3 mg/kg/j
    • alternative possible : amoxicilline/acide clavulanique 2 g x 3/j + gentamycine 3 mg/kg/j
  • Neutropénie :
    • pipérilline/tazobactam 4 g x 3/j + gentamycine 3 mg/kg/j
    • alternative possible : discuter en association : vancomycine 30 mg/kg/j notamment si matériel étranger apparaissant infecté
  • Pas de point d’appel :
    • cefotaxime 100 mg/kg/j ou ceftriaxone 50 mg/kg/j + gentamycine 3 mg/kg/j
  • En l’absence d’orientation étiologique :
    • infection communautaire : bêtalactamine à large spectre (staphylocoques, streptocoques, entérobactéries) + un aminoside
    • infection nosocomiale : céphalosporine (pyocyanique) + un aminoside

Catécholamines

  • Noradrénaline en première intention au mieux sur cathéter central

Surveillance

CLINIQUE

Surveillance horaire

  • Signes de choc
  • FR, PA au mieux en invasif (PAM > 65 mmHg), FC, T°
  • Fonction respiratoire (répercussion du remplissage massif)
  • SpO2, scope
  • Diurèse horaire (> 0,5 mL/kg/h en l’absence de diurèse osmotique ou administration de diurétiques)

PARACLINIQUE

à H+6

  • Lactatémie
  • Hémoglobinémie (8-9 g/dL)
  • Ionogramme sanguin, urémie, créatininémie, glycémie (éviter hyperglycémie > 8,3 mmol/L)

Devenir / orientation

Hospitalisation systématique

CRITERES D’ADMISSION EN REANIMATION

En préhospitalier

  • Tout sepsis grave impliquera idéalement un transport direct en réanimation

En intrahospitalier

  • Immédiatement si CIMU 1 ou PAS < 70 mmHg et/ou PAD < 40 mmHg
  • Dans un 2e temps, si aucune amélioration clinique et biologique malgré traitement bien mené :
    • HoTA persistante après 1 heure de remplissage
    • oligurie < 0,5 mL/kg/h, persistante pendant 3 heures malgré le remplissage
    • hypoxémie persistante
    • hyperlactatémie
    • créatinine > 177 µmol/L (20 mg/L) ou élévation > 50% par rapport au chiffre de base
    • thrombopénie < 100 000 /mm3 ou TP < 50% ou chute de > 30% de la concentration des plaquettes ou du TP lors de 2 prélèvements successifs
    • bilirubinémie > 34 µmol/L
    • surtout si comorbidité, type d’infection non connu

CRITERES D’ADMISSION A L’UHCD

  • Résolution des signes cliniques d’hypoperfusion
  • Absence de comorbidité significative
  • Type d’infection établi et de pronostic généralement favorable
     

Mécanisme / description

ETIOPATHOGENIE

Généralités de l’interaction hôte-pathogène au cours des formes sévères de l’infection

  • Une conférence de consensus a défini il y a plus de 15 ans le sepsis comme « le syndrome de réponse inflammatoire systémique qui survient au cours de l’infection ». Cela suggérait que l’hôte devait développer et mettre en oeuvre des armes pour lutter contre les microorganismes responsables de l’envahissement de tissus normalement stériles. La définition incluait une variété de réponses produite après coopération d’acteurs cellulaires tels que l’endothélium et les cellules mononucléées. Les progrès des connaissances modifient actuellement cette approche qui doit dorénavant inclure une activation du système de la coagulation, en particulier du fait de la production de facteur tissulaire qui va largement contribuer à la formation de thrombine permettant la formation de thrombus.
  • Quoiqu’elle ait été depuis largement remise en cause, la théorie originelle suggérait que le sepsis représentait une réaction incontrôlée de l’hôte. Lewis Thomas popularisa cette notion en écrivant que « les microorganismes qui nous infectent sont finalement plus passifs qu’il ne paraît. C’est la réaction à leur présence qui provoque la maladie. Le danger vient plus de la puissance de notre arsenal de défense que des intrus ».
  • Des données sur les mécanismes de défense d’invertébrés ont identifié un rôle de la coagulation dans l’immunité anti-infectieuse. Ainsi, chez le limule, la rupture de la cuticule qui la protège va activer l’amébocyte, une cellule qui circule dans son hémolymphe. Au contact d’endotoxines (lipopolysaccharide; LPS) bactériennes, les amébocytes activés par le système des récepteurs (de type Toll-like (TLR)) au LPS i) phagocytent les microorganismes, ii) s’agrègent, et iii) libèrent des produits anti-bactériens et procoagulants. Il s’ensuit la formation d’un caillot qui circonscrit le site d’invasion et limite la fuite d’hémolymphe. Ce système va séparer le milieu intérieur de l’arthropode et son environnement ; il contribue simultanément à la lutte contre l’infection et le saignement. En d’autres termes, les arthropodes ont depuis longtemps résumé en une cellule unique les mécanismes essentiels de l’immunité innée que l’évolution a affinée dans les autres ordres, particulièrement celui des mammifères. Ce chapitre résume les principaux mécanismes et les théories émergentes permettant d’approcher la physiopathologie du sepsis.

Rôle des microorganismes lors du sepsis

  • L’écologie du sepsis des années 2000 dans les pays occidentaux répond à la répartition suivante: plus de la moitié de bactéries à Gram positif, plus d’un tiers de bactéries à Gram négatif, moins de 10% de flore polymicrobienne et de germes anaérobies, 1% de levures ; les modifications récentes de l’écologie intéressent surtout les cocci à Gram positif et les levures. Prétendre que les microorganismes n’aient pas de responsabilité dans la genèse du sepsis serait caricatural. Ainsi, pour être virulente, la bactérie doit disposer d’un arsenal, reconnu sous le nom de virulome, lui permettant de s’accrocher au tissu, de pénétrer la barrière muqueuse ou tégumentaire, de se répliquer puis de disséminer en prenant de vitesse le système de défense de l’hôte. Les lésions infligées à l’hôte sont le fait de toxines et de médiateurs bactériens. Trois classes de toxines coexistent. Les toxines de type 1 sont libérées dans l’espace extracellulaire. C’est le cas du super-antigène du choc toxique staphylococcique ou streptococcique. Les toxines de type 2 permettent aux bactéries d’envahir l’espace intracellulaire après avoir lésé la membrane plasmique. Elles correspondent aux hémolysines et aux phospholipases. Les toxines de type 3 sont obligatoirement composées de deux parties et sont connues sous le nom de toxines A/B. elles associent un composant dont le rôle et la liaison (composant B) et un composant enzymatique qui est la partie active de la toxine (composant A). L’archétype est la toxine cholérique, mais de nombreuses autres espèces bactériennes possèdent des toxines de type 3. Leur rôle est d’endommager défenses et les barrières de l’hôte, et de permettre la propagation du germe. Le système de dissémination de la toxine consiste en son injection intracellulaire par une « aiguille ». La première toxine connue dans le sepsis et l’une des plus importantes est le lipopolysaccharide (LPS). Le LPS est le composant principal de la membrane des bacilles à Gram négatif. Néanmoins il semble n’avoir pas d’activité intrinsèque, et c’est la réaction de l’hôte en présence de LPS qui fait sa toxicité.
  • L’inoculum bactérien est un élément à prendre en compte dans la pathogénicité des microorganismes. La formation d’un biofilm va contraindre la prolifération d’une colonie bactérienne ; cependant, ce biofilm protège les bactéries du système de défense de l’hôte. Cet état qui régule la densité bactérienne est dénommé du terme anglo-saxon « quorum-sensing ». La modification de ce biofilm va être le signal d’une dispersion des bactéries. L’apparition d’un acide gras particulier (un acyl-homosérine lactone) va augmenter avec la densité bactérienne, diffuser au travers de membranes bactériennes et eucaryotes, et induire le signal de prolifération.
  • Cependant, et comme cela a été suggéré dans le chapitre introductif, c’est bien souvent l’interaction de l’hôte et du microorganisme qui va provoquer la maladie. Les motifs qu’expriment les bactéries forment autant de signaux potentiels pour activer les systèmes de défense de l’organisme agressé. Ces éléments de reconnaissance pour l’organisme sont appelés PAMP (Pathogen-Associated Molecular Patterns) ou MAMP (Microorganism-Associated Molecular Patterns). Des structures aussi différentes que les protéines flagellaires, les éléments membranaires, ou des acides nucléiques, vont être reconnues par une famille de récepteurs, qui vont engager l’immunité innée, première ligne de défense antimicrobienne de l’organisme. Cette dernière va également constituer un premier échelon dans la réponse inflammatoire de l’organisme qui, si elle n’est pas maitriser peut être délétère.

Les phénomènes inflammatoires lors du sepsis

  • Dans le contexte de l’infection, il existe une réponse inflammatoire exacerbée dont le rôle est d’optimiser la réponse anti-infectieuse. Une réponse mal contrôlée peut possiblement être délétère. Nous décrivons succinctement dans ce chapitre quelques éléments de cette réponse.

Les récepteurs de reconnaissance des pathogènes

  • Les PAMP sont les éléments permettant à d’initier l’activation de l’immunité innée. Les antigènes représentatifs de groupe de pathogènes vont être reconnus par des combinaisons de TLRs situés sur le système monocyte-macrophage et les cellules dendritiques. Ces récepteurs, dont il existe 11 formes humaines, sont « spécifiques » de PAMP. Ils vont permettre, en fonction de l’antigène reconnu, une activation différentielle de voies de signalisation, dont le résultat est la translocation nucléaire de facteurs transcriptionnels de la famille de NFkB. Ces derniers vont permettre la transcription de gènes dont résultera le phénotype global de la réponse à l’agression.

Activation de la cascade inflammatoire lors de l’infection : la réponse humorale

  • L’infection sévère s’accompagne d’une réaction inflammatoire systémique. Le corolaire en est l’augmentation de la concentration de cytokines pro-inflammatoires circulantes. Parmi celles-ci, il est généralement accepté que les plus représentées sont TNF-a, l’Il-1, l’Il-6, l’interféron-g . Si certains de ces facteurs comme l’IL-6, sont constamment élevés à de hauts titres au cours des infections sévères, la concentration de certaines cytokines est l’objet d’une grande variabilité. Ainsi, seulement 10 à 25% des patients présentent des concentrations mesurables de TNF-a. A ce groupe de cytokines, est opposé celui des facteurs anti-inflammatoires dont les éléments prototypiques sont l’IL-10 et l’IL-1ra. Le concept de vagues successives pro- et anti-inflammatoires a longtemps été proposé, avec l’alternance du SIRS, pro-inflammatoire, qui initie la réponse, et du CARS (compensatory anti-inflammatory response), anti-inflammatoire, qui éteint le phénomène. Une phase intermédiaire de chevauchement, d’une certaine « neutralité », nommée MARS (mixed antagonist response syndrome), a également été décrite. La question qui se pose est le rôle de ces cytokines pro- et anti-inflammatoires, et si un « équilibre » est nécessaire pour limiter un éventuel effet délétère. La séparation caricaturale de ces différents facteurs en phases distinctes permet de mieux appréhender les différents composants de la réponse de l’hôte à l’infection mais revêt un caractère artificiel. Les différentes phases semblent en effet beaucoup plus simultanées que ce qu’il n’a été initialement décrit. L’amplitude de la réponse cytokinique, pro- ou anti-inflammatoire, a été décrite comme péjorative.
  • A côté de la production protéique, il existe d’autres systèmes signalant l’inflammation. Ainsi, l’exposition au LPS permet d’activer la NO (pour monoxyde d’azote) synthase inductible endothéliale qui va accroître la concentration de NO. L’excès de NO circulant a été rendu responsable de lésions des petits vaisseaux avec diminution du tonus, pouvant aboutir à des dommages des viscères.
  • Cette réponse en termes de facteurs solubles ne correspond cependant qu’à une partie du système inflammatoire.

Activation de la cascade inflammatoire lors de l’infection : la réponse cellulaire

  • L’immunité cellulaire est indissociable de la réponse à l’agression de l’organisme par les agents infectieux. Lors de l’invasion par des microorganismes d’un tissu normalement stérile, la première réponse de l’organisme est la mise en jeu des cellules impliquées dans la réponse immunitaire innée, c’est-à-dire le système de phagocytose. Les macrophages et les cellules dendritiques sont activés après ingestion des bactéries et la stimulation par des cytokines telles que l’interféron-sécrétées par des lymphocytes T CD. Parallèlement à cette stimulation, certains lymphocytes CD4, les T helper type 2 (Th2) peuvent avoir des propriétés « inhibitrices » par libération d’interleukine-10, qui réprime l’activation des macrophages. Alternativement, les lymphocytes T CD4 peuvent bénéficier d’une stimulation par les macrophages ou les cellules dendritiques : ces cellules secrètent l’interleukine-12, qui permet la différentiation des lymphocytes en T helper type 1 (Th1) qui produisent à leur tour des cytokines pro-inflammatoires. Le message véhiculé par les macrophages et les cellules dendritiques va dépendre de très nombreux paramètres parmi lesquels le type de microorganisme et le site de l’infection. Le résultat final est un état pro-inflammatoire, anti-inflammatoire ou une anergie. Les cellules ayant phagocyté des éléments apoptotiques favorisent une réaction anti-inflammatoire ou une anergie, celles ayant phagocyté des cellules nécrotiques provoquent une inflammation soutenue (Th1).

ACTIVATION DE LA COAGULATION LORS DE L’INFECTION

  • Le phénomène de coagulation a été initialement décrit comme un mécanisme indépendant permettant de former un caillot qui limite le saignement lors de la rupture de la barrière vasculaire. Comme nous venons de l’évoquer, son rôle est bien plus complexe et participe à la défense anti-infectieuse. L’activation de la coagulation après exposition au LPS est une propriété hautement conservée qui a été affinée par l’évolution en particulier chez l’homme, un des êtres dont l’immunité innée est la plus développée. Le LPS provoque des altérations de la paroi des vaisseaux et active la voie intrinsèque de la coagulation. Il en résulte l’activation de voies canoniques d’aval aboutissant à la formation de complexes multimoléculaires dont la finalité est la polymérisation de la fibrine qui donne naissance au caillot. Cette voie peut faire l’objet d’une boucle d’amplification en cas de coagulation intra-vasculaire disséminée.
  • La voie extrinsèque dépend de l’expression de facteur tissulaire (TF) et de son association au facteur VII activé. La survenue d’un processus inflammatoire induit l’expression de TF à l’intérieur du lit vasculaire et à la surface du système monocyte / macrophage, avec libération de microparticules (des vésicules membranaires circulant dans le lit vasculaire). La cascade de la coagulation aboutit à la génération de thrombine, pierre angulaire du système dans le sepsis. A chaque fois que la coagulation est activée dans l’organisme, des mécanismes de lutte contre la formation du caillot sont simultanément activés : i) la fibrinolyse, ii) le système des anticoagulants naturels (protéine C, protéine S et thrombomoduline), et iii) la voie de l’inhibition de la voie du TF (TFPI). Une anomalie de l’un de ces mécanismes favorise le développement d’une CIVD.
  • La fibrinolyse est activée par la présence d’un caillot ou de concentrations élevées de cytokines pro-inflammatoires. Elle agit après activation de la plasmine par des activateurs (PA), eux-mêmes sous l’influence d’une régulation négative par les inhibiteurs des activateurs de plasmine (PAI).
  • L’antithrombine (AT) possède un rôle régulateur négatif des facteurs pro-coagulants tels que la thrombine et le facteur X. La protéine C et la protéine S, en association, vont cliver le facteur V et le facteur VIII activés. Les systèmes anticoagulants jouent également un rôle pro-fibrinolytique.
  • Le dernier système ou voie d’inhibition par le TFPI, voie également avoir une action anti-coagulante après libération des cellules endothéliales où il est stocké. En effet, le TFPI peut se lier au TF pour limiter son rôle dans la génération de thrombine. 
  • Au cours de l’infection, il existe un déséquilibre de ces phénomènes en faveur d’une coagulation accrue, du fait d’un déficit acquis en anticoagulants naturels et une fibrinolyse moins efficace. Avant même la survenue des éléments cliniques tels que l’hypotension artérielle et la fièvre, les anticoagulants tels que la protéine C, la protéine S et l’antithrombine III diminuent. Plus le spectre clinique témoigne d’une infection sévère (sepsis sévère versus choc septique), plus le déficit en anticoagulant naturel est marqué. Parallèlement, on observe une diminution de la capacité à résorber le caillot par la fibrinolyse, d’autant que le tableau clinique est sévère.

COLLABORATION DE LA COAGULATION ET DE L’INFLAMMATION POUR LA REPONSE A L’INFECTION

  • La survenue d’un sepsis provoque une augmentation du taux circulant de cytokines pro-inflammatoires telles que l’interleukine-6. Ces facteurs solubles ont la capacité d’accroître l’expression du TF à la surface des cellules endothéliales et des monocytes, responsable d’une activation de la coagulation par la voie extrinsèque. L’expression des récepteurs de la protéine C diminue en présence de protéines de l’inflammation comme le TNF-a et l’IL-1b. La conséquence est la production de thrombine. De manière paradoxale, le TNF- a induit une augmentation de la fibrinolyse parallèlement à son activité pro-coagulante mais le bilan du système reste globalement en faveur de l’effet pro-coagulant avec surproduction de thrombine.
  • Les systèmes du complément et protéines de stress concourent également à l’activation de la coagulation. A côté de ses actions chimiotactiques, d’activation des neutrophiles et de production de cytokines, la C reactive protein (CRP) active le système du complément qui contrôle la coagulation en inhibant la protéine C et la protéine S.
  • Les immunoglobulines sont capables dans certaines circonstances d’avoir une activité catalytique. Cela a été initialement décrit dans des situations d’autoimmunité. Cette propriété existe également lors du sepsis avec la possibilité de dégrader des facteurs de la coagulation qui pourrait réguler l’état procoagulant.
  • L’impact des cellules de l’inflammation sur la cascade de la coagulation est le mieux représenté chez les patients neutropéniques infectés. Les patients septiques non neutropéniques ont une activation de la production de thrombine et une fibrinolyse active, phénomènes beaucoup plus ténus chez le patient aplasique. Des niveaux élevés de PAI-1 sont toutefois observés dans les infections les plus sévères quel que soit le niveau de leucocytes circulants. Les cellules de l’inflammation sont impliquées dans l’activation de la coagulation. Les neutrophiles activés libèrent l’élastase qui clive l’antithrombine et diminue ainsi ses propriétés anticoagulantes.
  • C’est l’inadéquation de la réponse de l’hôte à l’agression par l’agent infectieux qui est responsable du spectre biologique et finalement des symptômes cliniques.

REPONSE SYSTEMIQUE ET DYSFONCTION D’ORGANES

  • Les défaillances d’organes impliquent le plus fréquemment des mécanismes d’inflammation et neuroendocrines. L’absence de lésion anatomique évidente après la phase de récupération du sepsis plaide encore en faveur de cette théorie, et les lésions secondaires à une ischémie ou une hémorragie tissulaire sont peu fréquentes. Par contre, les facteurs solubles (tels que le TNF, l’IL-1, le NO et les espèces réactives de l’oxygène) responsables d’anomalies de la respiration cellulaire mitochondriale ; les dysfonctions neuroendocrines qui altèrent les échanges et l’adaptation entre les différents organes ; la boucle d’auto-activation des états pro-coagulant et pro-inflammatoire, sont à l’origine de souffrances tissulaires et des dysfonctions d’organes.

Bibliographie

  • Prise en charge initiale des états septiques graves de l’adulte et de l’enfant Groupe Transversal Sepsis. Réanimation. 2007 ;16 :S1-S21
  • Fièvre et état de choc : les premières heures de la prise en charge. Allo JC, Ginsburg C, Dhainaut JF, Claessens YE. Fièvre et urgences. Monographies de la SFMU 2006
  • Prise en charge hémodynamique su sepsis sévère. Conférence de consensus. SFAR/ SRLF 2005
  • Rivers E . Early goal therapy in the treatment of severe sepsis and septic shock. NEJM 2001

Auteur(s) : Yann-Eric CLAESSENS

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