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Péricardite aiguë

Spécialité : cardiologie / infectieux /

Points importants

  • Environ 5% des patients pris en charge en urgence pour douleur thoracique
  • Pose le problème de diagnostic différentiel avec des affections à prise en charge spécifique immédiate et à potentiel évolutif à court terme
  • 85 à 90% de péricardites aiguës virales ou idiopathiques
  • Récurrence dans 15 à 50% des cas
  • Dépister les formes à risques d’évolution péjorative et les formes nécessitant un bilan étiologique

Présentation clinique / CIMU

SIGNES FONCTIONNELS

Douleur thoracique (90% des cas)

  • Rétro-sternale, de début aigu, exacerbée à l’inspiration, majorée par le décubitus
  • Possibles irradiations douloureuses au cou et bras
  • Majorée aux changements de position et aux efforts de toux

Dyspnée (plus rare)

  • Polypnée par inhibition respiratoire liée à la douleur
  • Rarement permanente et intense (tamponnade ?)

Fièvre

  • Fréquente, 38 à 38,5°C
  • Plus importante = facteur de risque de complications

Signes généraux

  • Inconstants
  • Syndrome pseudo-grippal, arthralgies et myalgies, altération de l’état général…

CONTEXTE

Terrain

  • Sujet jeune pour les péricardites aiguës idiopathiques ou virales
  • Autres : voir Diagnostic étiologique

Antécédents et facteurs de risques

  • ATCD de péricardite : 15 à 50% de récurrence
  • Autres : voir Diagnostic étiologique

Circonstances de survenue

  • Précédée d’un syndrome grippal ou d’une infection ORL pour les péricardites aiguës idiopathiques ou virales
  • Autres : voir Diagnostic étiologique

EXAMEN CLINIQUE

Frottement péricardique (dans 15 à 25% des cas au diagnostic et 85 % des cas au cours de l’évolution)

  • Sensibilisé par l’auscultation au bord gauche du sternum en fin d’expiration et patient assis en antéflexion
  • Persistant à l’apnée

Signes de tamponnade (et leur fréquence) de recherche systématique

  • Elévation de pression veineuse systémique : turgescence jugulaire (100%)
  • Pouls paradoxal > 10 mmHg (88 à 98%)(diminution de la pression artérielle systolique à l’inspiration)
  • HoTA voire état de choc : PAS < 100 mmHg (58 à 64%)
  • Tachycardie > 100 bpm (77 à 100%)
  • Tachypnée > 20 c/min (80 à 97%)
  • Bruits du coeur assourdis à inaudibles (34 à 84%)

EXAMENS PARACLINIQUES SIMPLES

ECG

  • Evolution en 4 phases de l’aspect électro-cardiographique (non conservée en cas de traitement précoce) :
    • sus-décalage concave diffus du segment ST (sans image en miroir) et sous-décalage du segment PR (D1, D2 et AVL+++)
    • retour à la ligne isoélectrique des segments ST et PR et aplatissement de l’onde T
    • inversion de l’onde T
    • normalisation de l’onde T (en quelques semaines à quelques mois)
  • Autres données ECG :
    • ratio entre l’élévation du segment ST et l’amplitude de l’onde T en V6 > 0,24 = argument fort pour le diagnostic de péricardite
    • sous-décalage de l’intervalle PQ
    • microvoltage dans les dérivations périphériques
    • fréquent trouble du rythme auriculaire (ESA, AC/FA paroxystique)
    • jamais d’onde Q ou d’image en miroir !

CIMU

  • Tri 3 à 5 en fonction de la gravité clinique
     

Signes paracliniques

BIOLOGIQUE

NFS

  • Recherche d’une hyperleucocytose :
    • inconstante
    • si majeure, évoquer une péricardite purulente

Dosage de la troponine

  • Elevée chez 35 à 50 % des patients (par inflammation épicardique plus que nécrose cardiomyocytaire)
  • Concentration plasmatique corrélée à l’amplitude du sus-décalage du segment ST
  • Une élévation marquée de la concentration plasmatique de troponine n’est pas un facteur indépendant de risque d’évolution sévère
  • Une élévation prolongée de la concentration plasmatique de troponine doit faire évoquer l’association à une myocardite à risque évolutif plus sévère

Autres examens biologiques : avec pour objectif le diagnostic étiologique (sans recours nécessaire en cas de présentation clinique typique non compliquée)

  • Intradermoréaction à la tuberculine
  • Sérologies virales dont VIH
  • Bilan auto-immun :
    • facteur rhumatoïde
    • anticorps anti-nucléaire
    • complément sérique

IMAGERIE

Radiographie du thorax

  • Initialement normale
  • En cas d’épanchement péricardique important :
    • cardiomégalie
    • silhouette cardiaque symétrique
    • bord gauche de la silhouette cardiaque rectiligne
  • 20 à 30% d’épanchement pleural associé
  • Intérêt pour le diagnostic différentiel et peut être une aide au diagnostic étiologique

Echographie cardiaque transthoracique

  • Signe le diagnostic quand positive mais non indispensable en cas de présentation clinique typique sans facteurs de mauvais pronostic
  • Visualisation et approche quantificative de l’épanchement en modes bidimensionnel et TM (< 1 cm = < 300 mL et > 2 cm = > 1000 mL)
  • Aspect caractéristique de « swimming heart » dans les épanchements volumineux : coeur hyperkinétique flottant au sein de l’épanchement
  • Possible absence d’épanchement échographique : péricardite « sèche » et débutante
  • Evaluation de la tolérance et signes échographiques de tamponnade :
    • épanchement circonférentiel abondant
    • compression télé-diastolique de l’oreillette droite
    • collapsus proto-diastolique du ventricule droit
    • diminution inspiratoire des flux trans-mitral et trans-aortique
    • distension de veine cave inférieure et des veines sus-hépatiques
       

Diagnostic étiologique

Idiopathique (85-90%)

Infectieuse

  • Virale (1-2%) :
    • coxackies, adénovirus, échovirus, VIH, VHA, VHB …
  • Bactérienne (1-2%) :
    • staphylocoque Auréus, Streptocoques, BGN et H Influenzae.
    • sur terrain immunodéprimé +++ et iatrogène (post-chirurgical).
    • évolution sévère (mortalité 40%)

Tuberculeuse (4%)

  • D’évolution sub-aiguë à chronique
  • Diagnostic évoqué sur le terrain d’immunodépression, l’altération de l’état général et de contage tuberculeux
  • Diagnostic de certitude sur la ponction-biopsie chirurgicale péricardique et l’analyse histo-pathologique

Infarctus de myocarde (5-10% des IDM)

  • A la phase aiguë : dans le cadre de réaction péricardique responsable de la réapparition d’une douleur thoracique et de rupture ventriculaire
  • Péricardite de Dressler : 15 jours à 3 sem. après la phase aiguë de l’IDM

Dissection aortique (< 1%)

Traumatique

Néoplasique (7%)

  • Lésions primitives du péricarde :
    • mésothéliome péricardique et sarcome péricardique
    • d’évolution sévère : péricardite constrictive+++
  • Lésions secondaires du péricarde :
    • leucémies, lymphome et tumeurs mammaires et pulmonaires+++.
    • tamponnade fréquente

Post-radique

  • Dans les 5 ans après radiothérapie thoracique
  • Tableau clinique souvent sévère : péricardite constrictive +++

Insuffisance rénale chronique (13% des patients hémodialysés)

  • Souvent asymptomatique
  • Expression clinique pouvant être sévère selon la tolérance hémodynamique à la séance d’hémodialyse

Post-chirurgicale

  • Dans 25% des cas après chirurgie cardiaque
  • De mécanisme inflammatoire ou hémorragique (anticoagulants)
  • Risque de tamponnade +++

Pathologie auto-immune et collagénose (3-5%)

  • LEAD, PR, sclérodermie …

Iatrogène (< 1%)

  • Dantrolène, doxorubicine, hydralazine, phénytoine, procaïnamide …

Diagnostic différentiel

Celui de tout syndrome douloureux thoracique !

Douleur thoracique avec détresse vitale

  • Infarctus du myocarde
  • Dissection aortique
  • Tamponnade cardiaque d’autre étiologie
  • Embolie pulmonaire massive
  • Pneumopathie aigue sévère
  • Pneumothorax compressif
  • Rupture spontanée de l’oesophage

Douleur thoracique sans détresse vitale à risque évolutif précoce

  • Insuffisance coronarienne aiguë
  • Embolie pulmonaire
  • Anévrysme de l’aorte thoracique

Autre tableau douloureux thoracique

  • Douleur pleurale
  • Pneumo-médiastin
  • Hernie discale thoracique
  • Trouble de la motilité oesophagienne
  • Syndrome de Pancoast-Tobias
  • Reflux gastro-oesophagien
  • Ulcère gastroduodénal
  • Pancréatite aiguë
  • Cholécystite
  • Douleur pariétale thoracique

Traitement

STABILISATION INITIALE

  • Conditionnement pré-hospitalier plutôt maximaliste dans le cadre des diagnostics différentiels évoqués (SCA, dissection aortique …)
    • VVP de bon calibre
    • surveillance rythmique et tensionnelle continue
  • L’amélioration symptomatique sous AINS est un argument du diagnostic
  • Première dose : aspirine 1000 mg
  • Majoration antalgique, si nécessaire titration morphinique
  • En cas de tamponnade :
    • remplissage vasculaire dans le but de rétablir la pré-charge ventriculaire (bénéfice d’autant plus net sur l’hémodynamique générale et l’index cardiaque que le patient est hypotendu).
    • si nécessité d’un support vasopressif : dobutamine de première intention
    • respecter les mécanismes compensateurs que sont la tachycardie, la veino-constriction et la ventilation spontanée !
    • si nécessité d’IOT (troubles de conscience, état de choc réfractaire aux thérapeutiques entreprises ou hypoxie sévère) : risque de désamorçage cardiaque d’où ISR puis ventilation à faible volume courant et fréquence élevée
    • devant l’échec de traitement entrepris, la détresse vitale majeure et en sauvetage ou en cas d’ACR avec forte suspicion étiologique de tamponnade: péricardiocentése de sauvetage
    • orientation vers un plateau technique et de réanimation spécialisés.

SUIVI DU TRAITEMENT

  • AINS sans durée de traitement définie (entre 5 et 21 jours ?).
  • Aspirine 2 à 4 g/j
  • Un traitement par colchicine adjoint au traitement conventionnel par AINS diminue le taux de récurrence et la persistance des symptômes à la 72e heure
  • La corticothérapie favorise les récurrences
  • Indications de drainage péricardique chirurgical et de biopsies péricardiques :
    • mauvaise tolérance clinique et/ou échographique
    • péricardite post-chirurgicale, traumatique ou purulente
    • péricardite prolongée dans le temps
  • Antibiothérapie adaptée aux résultats des prélèvements pour la péricardite purulente
  • Traitement antituberculeux et corticothérapie pour la péricardite tuberculeuse

MEDICAMENTS

  • Aspirine 2000 à 4000 mg/j
  • Ibuprofène jusqu’à 2400 mg/j
  • Colchicine 0,5 à 1 mg/j

Surveillance

  • Surveillance clinique principalement
  • Amélioration symptomatologique rapide sous AINS
  • Envisager un bilan étiologique plus approfondi en cas de prolongation de la symptomatologie clinique (à J7 du début de traitement) ou de récurrences fréquentes

Devenir / orientation

EN PREHOSPITALIER

  • Transport aux urgences générales ou spécialisées pour confirmation diagnostique et surtout élimination de tout diagnostic différentiel à potentiel évolutif
  • Transport vers un plateau technique spécialisé (chirurgie cardio-thoracique) en cas de mauvaise tolérance clinique ou argument clinique en faveur d’une tamponnade

EN INTRAHOSPITALIER

Envisager une hospitalisation pour prise en charge clinique et diagnostique étiologique devant :

  • Signes évocateurs de cause spécifique :
    • fièvre > 38°C
    • évolution subaiguë
    • épanchement volumineux ou tamponnade
    • échec du traitement anti-inflammatoire
    • sexe féminin
  • Facteurs de risque d’évolution compliquée :
    • sexe féminin
    • fièvre > 38°
    • évolution subaiguë
    • traitement anticoagulant
    • épanchement volumineu
    • échec de traitement anti- inflammatoire à J7
    • traitement corticoïde
    • élévation de troponine et myocardiopathie associée
    • immunodépression
    • traumatisme récent

CRITERES DE SORTIE

  • Amélioration symptomatologique sous traitement anti-inflammatoires non stéroïdiens
  • Arrêt de travail selon le contexte socioprofessionnel (8 à 10 jours ?)
  • Consultation cardiologique en ambulatoire à J+8
  • Sortie avec copies du bilan biologique et ECG+++

Mécanisme / description

  • Péricarde = sac fibrineux contenant le coeur et la racine des gros vaisseaux
  • Constitué de deux feuillets : péricarde pariétal et péricarde viscéral ou épicarde
  • Entre les deux feuillets : une cavité « virtuelle » contenant 20 à 50 mL de liquide
  • Péricardite = réaction inflammatoire des deux feuillets du péricarde avec constitution ou non d’épanchement liquidien sécrété par la séreuse. Le remaniement inflammatoire est lié à un afflux de polynucléaires neutrophiles et de lymphocytes et à des dépôts de fibrine

Bibliographie

  • Richard A. Lange and L. David Hillis. Acute Pericarditis. N Engl J Med 2004;351:2195-202
  • David H, Spodick. Sc. Cute Cardiac Tamponnade. N Engl J Med 2003;349:684-90
  • Zayas R, Anguita M, Torres F, et al. Incidence of specific etiology and role of methods for specific etiologic diagnosis of primary acute péricardites. Am J Cardiol 1995;75:378-82
  • Permanyer-Miralda G. Acute pericardial disease: approach to the aetiologic diagnosis. Heart 2004;90:252-4.
  • Urgences médico-chirurgicales de l’adulte. P. Carli, B. Riou et C. Télion. Ed Arnette
  • Indicators of Poor Prognosis of Acute Pericarditis
  • Colchicine in Addition to Conventionnal Therapy for Acute Pericarditis: Results of the Colchicine for acute Péricardites (COPE) Trial
  • Hemodynamics Effects of Volume Expansion in Patients With Cardiac Tamponade

Auteur(s) : Jean-Marie BONNEC, Pierre-Géraud CLARET

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